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La nouvelle génération de cinéastes taïwanais montre ce qu’elle a dans le ventre. Un peu à l’image des films de Chung Mong-hong (Godspeed, A Sun) ou Chienn Hsiang (Exit), Wi Ding-ho (d'origine malaise) s’affirme avec ce Cities of Last Things comme un réalisateur qui n’hésite pas à sortir des carcans du cinéma traditionnel pour proposer quelque chose d’un peu plus atypique, au risque de parfois se perdre.


Et cela commence dans ce film avec une narration non-linéaire, segmentée en trois parties. Chacune de ces parties, de taille à peu près équivalente, raconte une nuit de la vie du protagoniste (Zhang Dong Ling). D’abord lorsqu’il a environ 50 ans, dans un futur dystopique (2049), ensuite lorsqu’il en a 20 (temps présent) puis 17 (années 2010). C’est donc un récit antichronologique, dont le premier tiers est de fait plus obscur que les deux autres, lesquels viendront par la suite éclairer sur le comportement et les agissements du personnage principal.


Il ne faut pas s’attendre à de grands rebondissements cependant, le scénario est globalement convenu. Quelques révélations surviendront, par des moyens subtils, jamais mis en valeur grossièrement par un cinéaste qui semble savoir ce qu’est justement la subtilité au cinéma (économie de langage, évocation visuelle simple). Les dialogues sont rares, et ne cherchent pas à aller du côté de sujets trop pompeux ou pédants ; on ne peut qu’en féliciter M. Wi.


La mise en scène est également une réussite, fluide, aidée par un montage de qualité. M. Wi semble s’être imposé une contrainte : filmer tout son film en lumière naturelle ou alors avec peu d’artifices, puisque durant certaines scènes le grain de la caméra numérique est très médiocre. Un défaut qui ne nuit pas outre mesure au visionnage, mais qui fait un peu tâche au milieu d’un tableau aussi satisfaisant.


Pour ce qui est du rythme, il faut admettre que les choses sont un peu moins reluisantes. Le premier segment prend des allures de Murderer dans un Taïwan futuriste/cyberpunk, avec un anti-héros foutu et à moitié taré dont on peine à saisir toutes les intentions. Le deuxième, le plus classique des trois, mais aussi le plus poétique, tend clairement du côté du drame romantique. Le troisième et dernier est aussi le plus anecdotique, même s’il ouvre sur un final assez convaincant.


Il apparaît donc à fortiori que l’ensemble est un peu bancal, mais soutenu par une atmosphère comme hors du temps bien sentie, de plus qu’un usage de la violence cru et crédible. C’est un film noir, et qui comme tout bon film noir ne s’embarrasse pas d’éléments qui pourraient alourdir inutilement son intrigue. Un aspect qui a ses avantages comme ses inconvénients, mais qui apparaît ici davantage positif pour l’expérience du spectateur (on ne s’ennuie quasiment pas en presque 2h). Ce cinéaste a de beaux jours devant lui s’il continue dans cette voie. Espérons !

grantofficer
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le 11 août 2022

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