Un lien fusionnel, une force gravitationnelle, lie le petit Massimo à sa maman.
Le refus catégorique de sa mort par le petit nous amuse presque, mais ô combien tragiquement : juste avant l’arrivée du curé, il demande quand même d’ouvrir le cercueil, clamant à tous qu’elle n’y est pas...
Tandis que le film nous dévoile implicitement les causes de la disparition de la mère, Massimo s’alimente des mensonges des adultes, sur lesquels il construira sa propre vie. Mais peut-on être adulte quand sa vie n’est que la continuation du combat de l’enfance pour retrouver sa mère? Les allers et retours dans un passé jamais cicatrisé sont parfaitement dosés dans le film et posent un décor déconcertant d’occasions manquées.
La révolte, la foi, la superstition, la soumission à Belphégor : Massimo passera par toutes ses supercheries pour faire revenir sa mama. Notre attendrissement désolé face à l’incompréhension de l’enfant, privé de maman, aurait pu se transformer en condamnation de l'adulte, qui aurait dû comprendre, déduire, réfléchir. Et pourtant on se surprend à chercher les flash backs des souvenirs heureux avec la maman… D'ailleurs, le jeu des acteurs jouant Massimo sont d’une poignante continuité.
Massimo adulte est journaliste sportif. Comment ne pas voir dans les commentaires laconiques du déroulement d'un match de foot une échappatoire à sa question laissée en suspens? Le foot à une nécessité rassurante : le joueur passe le ballon ou non ; le ballon rentre dans les cages ou non ; un joueur marque un but ou pas. Mais comment est morte maman ?
Le journalisme le conduira aussi au cœur des atrocités de Sarajevo. C’est dans ce décor morbide que l’on voit un garçon jouer à la Gameboy. Alors vient la prise de conscience que l’avenir d’un pays est fatalement dans sa jeunesse. Que l’avenir d’un homme est à jamais marqué par son enfance.
Marco Bellocchio nous enchante avec ce film sur le mensonge, la famille, les souvenirs et on en ressort avec une terrible envie de se battre pour la vérité, à dire à un moment donné.

Nuwanda_dps
9
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le 9 janv. 2017

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Emilie Rosier

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