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On ne choisit pas sa famille, mais on n’en a qu’une seule

Jarmusch offre une remarquable démonstration de la puissance du dialogue cinématographique dans son dernier film au titre évocateur : Father Mother Sister Brother.


Structuré en trois séquences nettement distinctes, le réalisateur de l’inoubliable Ghost Dog y dépeint trois tableaux familiaux à la fois drôles et touchants, ponctués de clins d’œil qui circulent d’un récit à l’autre. Ces histoires ne se rejoignent pas par leurs personnages, mais par ce qu’elles disent. La morale pourrait se résumer ainsi : on ne choisit pas la famille dans laquelle on naît, mais on n’en a qu’une, et celle-ci nous est chère. Il ne s’agit ni de la détruire ni d’en proposer une critique frontale, mais d’en révéler les fragilités et les vulnérabilités, les difficultés à communiquer, notamment à travers des situations de retrouvailles.


La tonalité du film est volontairement nostalgique. Les situations mises en scène possèdent une dimension universelle : même si aucune des histoires racontées ne nous est directement arrivée, elles nous touchent, car nous avons tous, ou presque, connu une famille.. Jarmusch utilise alors pour transmettre ce sentiment une musique principale lente et douce, des transitions étirées et contemplative entre les séquence ou encore le ralenti... Il y a quelque chose de lent dans ce film, mais cette lenteur n'est jamais un problème en soit. On se pose avec les personnages pendant de longues minutes, on les écoute se parler, se retrouver, se dire au revoir. C'est toujours très intéressant. On se prend à éprouver du plaisir devant ces petits moments de gênes qui nous rappelle parfois ceux lorsque l'on revoit un proche après de longues années, sans savoir quoi lui dire.


Il faut souligner encore une fois à quel point Jarmusch maîtrise l’art de filmer le dialogue. Celui-ci n’est jamais décoratif ni démonstratif : il constitue la chair et l'os du film. Pourtant, une grande partie de ce qui importe se joue dans les silences et les non-dits, qui deviennent eux-mêmes une forme de discours : regards fuyants, phrases banales, gestes discrets. Plus encore que les mots, la direction corporelle des acteurs est à saluer : tout passe par la gestuelle, par la physionomie. Ces éléments vocaux et corporels traduisent les difficultés à communiquer, à faire, ou refaire, famille.

Cast17
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Théo Cast

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il y a 1 jour

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