Few of us est le troisième Bartas que je regarde depuis hier et encore une fois Bartas mélange intelligemment documentaire et fiction cherchant sûrement à critiquer un monde à la dérive, mettant ici en scène des villageois violents, alcooliques, une femme magnifique mais totalement vidée de substance et des paysages viscéralement magnifiques, une Sibérie filmée avec un génie rare.

Dans l'absolu le film ne me plaît pas plus que ça, Bartas en général ne m'emporte pas dans son délire d'artiste dépourvu du sens du langage ne cherchant à toucher que par la perfection de ses images, il me laisse souvent à la porte, un peu comme les rennes vers le début du film. L'absence de dialogue, de parole annihilent, à mes yeux, tout impression d'identification aux personnages, on se retrouve à regarder des protagonistes qui hantent un lieu en péril voué à disparaître ou à remplacer un monde civilisé arrivant à son terme. Ce monde est représenté par la magnifique Katerina Golubeva qui débarque dans ce village au bout du monde en hélicoptère pour y faire on ne sait quoi, sorte d'astuce du réalisateur pour ne pas tomber dans le documentaire pur et nous conter les mésaventures d'une demoiselle en quête d'identité ? Ou juste perdue dans cette immensité...
Elle est toujours présente pour nous ramener dans cette fiction, entrecoupant de long plan fixe sur une nature immense et sublime. Mais que vient-elle faire ici ?
Tout au long du film on se demande si sa présence est ou non utile, pourquoi Bartas ne nous pond pas un simple documentaire sur ce village Sibérien ?
Sûrement pour approfondir son idée de deux mondes qui s'opposent, cela représenté par une scène assez surréaliste d'une bagarre d'ivrognes avec notre belle (mais vide) Katerina Golubeva après une soirée assez glauque autour d'un accordéon et d'une vieille à la respiration on ne peut plus étrange à qui il ne reste que trois dents.
Cette femme, arrivée en hélico puis en véhicule militaire peut être vue comme l'objet de désir étranger que convoite un peuple qui n'a aucune idée de ce qui peut bien se passer au-delà de la montagne, de la forêt. L'occident qui s’immisce dans cette enclave en paix et provoque sa perte.
En effet (spoiler) le film s'achève sur le meurtre d'un des membres de la communauté par un autre, ce membre n'étant qu'une espèce d'ange gardien discret de cette femme, toujours là pour la surveiller sans jamais la défendre, un conseiller silencieux, une ombre qui surveille et rend jaloux l'homme qui, dans les derniers instants du film, le tue sèchement, sans le moindre état d'âme un peu comme la nature détachant des stalactites de glace d'une roche au premier signe d'un printemps brumeux.
Un assassinat qui en dit long sur le désir d'avoir toujours plus au point d'en oublier le principal.

Bref, je m'emporte un peu, je spécule beaucoup, au mieux le film n'est peut être qu'une peinture magnifique d'une nature lointaine habité par des âmes, des ombres qui errent dans ces terres et qui sont tentées par une femme au visage inexpressif d'une femme qui vient la sans le moindre but.

Au passage, pour motiver, en effet ma critique ne doit pas spécialement donner l'envie de voir le film, il y a une superbe scène de nue et de caresses douces et délicates d'une poitrine lisse et frileuse (ça peut en motiver certains de savoir ça... (une image pour la forme même, je suis vraiment trop gentil : http://www.cinelounge.org/imgfull/19290.jpg ).

Au final ce film me laisse perplexe, me faisant penser un peu à « Image du Vieux monde » le pouvoir de la parole en moins, malgré tout il me tarde de le revoir, même qu'en fond, comme un apaisement en fin de journée, surtout que la musique, qui hante les films de Bartas ( un peu à la manière de Verdi (désolé si je me trompe) dans le film Vie de Pelechian) est absolument magnifique et arrive de temps en temps (pour nous réveiller ? Haha) ou tenter de nous emporter au loin avec elle.
Je lui préfère malgré tout Freedom, que je recommande également, soyons fou.
Sasory
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le 4 janv. 2013

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Sasory

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