Il en est sur terre des gentils garçons.
Ce genre de garçon qui s'excuse de se faire marcher sur le pied, qui trouve toujours des circonstances atténuantes au connard invétéré qui leur botte le cul.
Ce genre de mec qui pense qu'il y a généralement une lueur d'espoir, un brin d'espérance dans l’œil vide et le front bas de l'idiot congénital.
La belle vision des choses, "Always look on the bright side of life...". L'optimisme béat comme drapeau, flottant courageusement sur la connerie humaine contre vents et marées.


Charlie Baileygates fait partie de ces gentils garçons.
Charlie est policier dans la jolie ville de Providence. Tout se passe bien dans le meilleur des mondes. Il aime son métier, il aime ses amis et il adore celle qui vient de devenir sa femme pour la vie.
Cette femme, cette magnifique blonde qui lui a donné ces trois merveilleux enfants, ces trois sublimes Afro-Américains et qui décide un beau jour d'abandonner notre Charlie pour vivre sa vie avec un nain black belliqueux et conducteur de limousines.
Charlie se retrouve seul du jour au lendemain avec ses trois enfants et son violent désespoir qu'il tente d'enfouir comme il peut au fond de son coeur.


La douleur est grande pour le gentil Charlie, mais il faut continuer d'avancer. Il se réfugie dans ce qui lui reste: La paternité et la routine professionnelle abrutissante.
Mais des années à courber l'échine, à sourire aux mômes têtes-à-claques, à accepter brimades et moqueries; ces années de refoulement et d'acceptation douloureuse jusqu'à l'étincelle.
Cette dernière goutte de méchanceté qui fait déborder ce vase de gentillesse.
Cette dernière goutte d'agressivité, de médiocrité qui va noyer le pauvre Charlie au fond de sa grandeur d'âme et laisser surgir des profondeurs de son être son double maléfique : L'odieux Hank.


En l'espace de deux films ( Dumb and Dumber et Mary à tout prix, sans compter Kingpin) Les Farrelly Bros vont filer un sacré coup de neuf à la comédie Américaine en la trempant allègrement dans un mélange poisseux de mauvais goût et de vulgarité assumée.
C'est en terrain conquis et attendu par fans et critiques que les frangins balancent le schizophrénique Me, Myself & Irene aux yeux étonnés d'un public avides de galéjades burlesques et régressives.
Et qui de mieux pour interpréter le dantesque bipolaire Charlie Baileygates que l'homme des débuts, celui qui les fera connaître: Le monstrueux Jim Carrey.


Les Frères Farrelly vont lâcher la bête Carrey sur cette histoire d'amour et de schizophrénie. L'acteur ravagera le personnage, cannibalisera le métrage, ne laissant que les miettes aux autres acteurs (qui ne déméritent pourtant pas).
C'est un rôle taillé sur mesure pour l'animal Carrey. Le fauve est lâché.
Carrey explose les gags, explose ses limites, son physique, se donne entièrement à la folie du personnage, "Schizophrènise" son corps et les spectateurs.
Les Farrelly laissent le champ libre à Jim Carrey qui navigue dans le film comme un funambule sur son fil.
Le fil ténu tremblant au dessus de l'infantilisme et du mauvais goût, flirtant avec le vide abyssal de la vulgarité, la touchant du doigt, la frôlant très souvent mais n'y tombant jamais.
Les gags pipi-caca, la grossièreté et la régression sont au final désamorcées par l'état de grâce de Jim Carrey qui flotte comme l'ange de l'humour décomplexé au dessus d'un océan d'obscénités et de situations graveleuses.


Les Frangins Farrelly signent là leur dernier succès, leur ultime bon film.
Fous d'Irène vient clore leur trilogie (inavouée) de la connerie crasse et insondable et offrent à Maître Jim l'écrin fabuleux pour exposer son talent immense de "Slapsticker" moderne.
Les Frères ont ouvert la voix à la bêtise édifiante et à l'humour irrespectueux que beaucoup de monde, plus (L'Apatow Team) ou moins (Les American Pie et autres...) talentueux viendront emprunter allègrement.


Ils profiteront de ce chemin tout juste défriché.
Ils rouleront à fond la caisse et sans ceintures sur cette voie nouvelle encore glissante, mais garderont l’œil sur le rétro pour voir au loin la statue du commandeur Carrey qui les couve d'un oeil bienveillant et amusé.

Ze_Big_Nowhere
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le 20 sept. 2015

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Ze Big Nowhere

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