Quand Channing Tatum, ex stripteaser, et Steve Carell, ex comique (non c’est méchant), obtiennent les rôles titres d’un film sur le catch basé sur des faits réels, le résultat ne peut laisser indifférent. Lorsqu’en plus la moyenne du film dépasse allégrement le 7 et que vos éclaireurs ne tarissent plus d’éloges, c’est le cœur léger que vous vous rendez dans une salle obscure.
Et là c’est le drame.
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On me dit que c’est une histoire vraie. Je veux bien le croire, mais au final, peu importe. Le récit est linéaire et truffés de lenteurs qui n’apportent rien au film, surtout dans la première partie. Le discours que le coach John du Pont (le millionnaire mégalo interprété par Carell) écrit pour Mark Schultz (Channing Tatum, plus bestial que jamais) suffit à lui seul à comprendre toute la perversité du premier personnage, obnubilé par l’idée de transmettre ses valeurs. Etait-ce la peine de rajouter toutes ces scènes aussi longues que laborieuses où Carell filme un documentaire grotesque le glorifiant comme « mentor » et « père » de ses sportifs ?
D’autre part tout le monde s’émerveille devant la performance de Steve Carell. S’il colle plutôt bien à son rôle de fils de riche en mal de reconnaissance maternelle et en quête de leadership, c’est surtout son changement de registre (certes réussi) et son maquillage (assez laid) qui ont contribué à ce qu’une « bonne » interprétation devienne « excellente » dans la bouche de certains.
Le personnage de John du Pont est d’ailleurs très intéressant, tout comme celui de sa mère, vieille femme aux valeurs aristocratiques démodées, dont le passé n’est pas clairement évoqué et n’en reste que plus énigmatique. De même certains éléments pris à part sont très bien vus. Par exemple, la hiérarchisation des sports par la métaphore (un peu lourde) de l’équitation qui élève contre la lutte, considérée comme inférieure, où les adversaires se traînent sur le sol, plus bas que terre. Le subtil rapport crypto gay entre John et Mark (on me signale que c'était voulu) est d'autre part très bien amené.
Mais ces points positifs sont noyés dans un océan de plans fixes à l'intérêt narratif moindre.
Dans le genre étude des relations maître-élève le récent Whiplash qui partait pourtant sur un sujet ennuyant de prime abord (la batterie de jazz), arrive à captiver le spectateur de bout en bout. Sans pour autant rentrer dans ce montage cut, ces couleurs irréelles et ces dialogues expéditifs, Foxcatcher aurait au moins gagné à être raccourci, j’en suis persuadée.
Seule la fin du film, brutale, prenant aux tripes, est une belle tentative pour inverser la courbe de l’ennui.
Mais elle intervient bien trop tard : vos paupières sont déjà lourdes.
La tonne de clichés supplémentaire qui suivra (musique triste et plans fixes sur des cadres où trônent des photos de famille idéale) vous achèvera peut-être comme elle m’a achevée.
Edit:
PS : j'ai oublié de mentionner ces affreux plans "flous parce que c'est vu d'une fenêtre tavu " aussi laids que vides de sens.
PPS : ce n'est pas parce qu'on filme les Etats-Unis (à savoir 3 maisons au bord de la route, des gymnases et une villa de riche) qu'on fait un film sur les Etats-Unis. Arrêtez de trouver une portée universelle à chaque fiction centrée sur une intrigue étriquée.