Gens de Dublin par Teklow13

Je trouve ça très beau, très humble et touchant de finir une carrière sur un film qui n’a l’air de rien, qui est une petite chose, sans ressorts dramatiques, sans véritables enjeux scénaristiques, tout en étant à la fois très subtile et riche dans son exploration sous-terraine de l’âme humaine, de l’amour et de la mort . D’une certaine manière, c’est le film d’adieu parfait, et la dernière séquence, superbe en l’état, est d’autant plus émouvante recentrer dans ce contexte.
Et il est intéressant de suivre le parcours de Huston, démarrant dans le cinéma hollywoodien de studio, et basculant dans un cinéma plus européen après être passé par le nouvel Hollywood. Ce dernier film est vraiment marqué par le cinéma européen des années 70, de Bergman à Ivory en passant par Losey.
Gens de Dublin est donc l’adaptation d’une nouvelle de Joyce, « les morts ».
L'histoire se passe à Dublin, chez les vieilles demoiselles Morhan, en 1904. Le film dure le temps de la soirée, les personnages chantent, dansent, jouent de la musique, discutent, mangent. S’il se dégage de ces séquences une sérénité, une délicatesse, une légèreté, elles sont percées par endroits par des petits détails qui soulignent une gravité, une mélancolie latente. Des travelings sur des objets, des regards perdus, des faux sourires, des rires interrompus, une musique, pour bien sûr arriver petit à petit sur cette dernière séquence, où le corset s’ouvre pour libérer des vérités enfouis, cacher sous l’habillage et le maquillage.
Gens de Dublin est un film froid, mais réchauffé par une petite flamme discrète, c’est très beau.