Il est difficile de donner un avis vraiment tranché sur cette adaptation US du manga et de l'anime mythiques, tant le spectateur un tant soit peu "éduqué" quant à l’œuvre originale est balloté durant le film entre des sentiments contradictoires. Disons que, au moins, à la différence de la plupart des blockbusters hollywoodiens, "Ghost in the Shell" stimule la réflexion, ce qui n'est déjà pas si mal. Le principal travers du film, totalement prévisible et imputable au gouffre culturel entre les USA et le Japon, est la transformation de la vision quasi-philosophique de l'évolution d'une humanité "augmentée" par la cybernétique et contemplant avec mélancolie un futur virtuel certain, en un thriller ultra-conventionnel sur la recherche nostalgique de l'humanité qui reste encore en nous (une touche de Philip K. Dick avec les souvenirs artificiels injectés dans le Major, une ambiance très "Blade Runner" comme si le film de Ridley Scott constituait encore l'alpha et l'omega en matière de prospective). Si les enjeux sont simplifiés par rapport au travail original de Mamoru Oshii en particulier, et donc plus "compréhensibles", cette vision inverse de l'évolution signe bien l'aspect profondément réactionnaire de la culture américaine actuelle, et bien entendu, la frilosité des studios hésitant à sortir des codes du cinéma de grande consommation. Sinon, et à condition de ne pas trop en attendre, le film - assez plat et anodin quand même, ce qui est un comble - reste un spectacle roboratif, grâce à la beauté stupéfiante des images, à la décision pertinente de reproduire (jusqu'au copié / collé) les choix de mise en scène, de rythme et de narration de Oshii, et surtout, surtout, au travail étonnant d'une Scarlett Johansson continuant judicieusement à jouer de cet incroyable décalage - dans la vie "réelle" - entre son image publique et son mystère intime, et plus encore entre sa voix et son corps starisé. Finalement, le seul vrai gouffre sensoriel et mental du film de Rupert Sanders, c'est Scarlett. Et ça nous ira pour cette fois. [Critique écrite en 2017]

EricDebarnot
6
Écrit par

Créée

le 2 avr. 2017

Critique lue 679 fois

19 j'aime

5 commentaires

Eric BBYoda

Écrit par

Critique lue 679 fois

19
5

D'autres avis sur Ghost in the Shell

Ghost in the Shell
T-rhymes
4

Il est où le Ghost ?

Ghost in The Shell.... Adaptation live des films d'animation Ghost in The Shell et Ghost in The Shell 2 Innocence, sortis respectivement en 1995 et 2004, . Eux même adaptés du manga culte de Masamune...

le 23 mars 2017

114 j'aime

26

Ghost in the Shell
Velvetman
6

Human being in The Shell

Le Ghost in The Shell de 1995 voyait le Major se poser une question : « Qu’est-ce que je suis ». La version hollywoodienne avec Scarlett Johansson en lead voit ce personnage mi humanoïde mi...

le 30 mars 2017

99 j'aime

4

Ghost in the Shell
Behind_the_Mask
7

Phantom Pain

Cher abonné, A travers ce modeste avis, j'aurais pu, après vous avoir dit que je m'étais rematé Ghost in the Shell, Innocence, Stand Alone Complex et Arise, me lancer dans un jeu des sept erreurs...

le 1 avr. 2017

91 j'aime

30

Du même critique

Les Misérables
EricDebarnot
7

Lâcheté et mensonges

Ce commentaire n'a pas pour ambition de juger des qualités cinématographiques du film de Ladj Ly, qui sont loin d'être négligeables : même si l'on peut tiquer devant un certain goût pour le...

le 29 nov. 2019

204 j'aime

150

1917
EricDebarnot
5

Le travelling de Kapo (slight return), et autres considérations...

Il y a longtemps que les questions morales liées à la pratique de l'Art Cinématographique, chères à Bazin ou à Rivette, ont été passées par pertes et profits par l'industrie du divertissement qui...

le 15 janv. 2020

190 j'aime

104

Je veux juste en finir
EricDebarnot
9

Scènes de la Vie Familiale

Cette chronique est basée sur ma propre interprétation du film de Charlie Kaufman, il est recommandé de ne pas la lire avant d'avoir vu le film, pour laisser à votre imagination et votre logique la...

le 15 sept. 2020

184 j'aime

25