L’erreur monumentale commise par ce Godzilla vs. Kong consiste à délaisser l’humain pour mieux saisir le grandiose d’un affrontement de deux puissances titanesques, sans pour autant épouser la focalisation des monstres. C’est ne rien comprendre à l’entreprise d’un Guillermo Del Toro qui, lui avait saisi l’importance de l’humain pour mesurer le gigantisme : son Pacific Rim (2013) opposait ainsi deux échelles et en tirait une vision du chaos. Le film d’Adam Wingard – à qui l’on doit déjà Death Note en 2017 – se voit ainsi écartelé entre deux postures : celle du jeu d’arcade dans lequel un gros singe tabasse un gros lézard, faisant du spectateur un témoin minuscule ; celle d’un vaste manège à sensations fortes qui le mettent au centre du dispositif et de l’attention, les vaisseaux et autres véhicules agissant à la manière de ces chariots qui nous retournaient la tête lorsque les parcs d’attractions étaient encore ouverts.


Les personnages, à la caractérisation aussi sommaire et unilatérale que l’origine des acteurs qui les campent – Alexander Skarsgård est suédois, Kyle Chandler américain, Millie Bobby Brown britannique, Brian Tyree Henry afro-américain, Shun Oguri japonais et Eiza González mexicaine –, n’ont même pas le rôle de pions sur un échiquier dont dépendrait la survie des bestioles ; ils cochent des cases politiques et meublent une intrigue à ce point lacunaire qu’elle doit creuser le sol jusqu’au centre de la Terre. Aussi le déferlement d’action, les retournements abracadabrants, les univers intégrés, tout cela s’avère-t-il stérile parce que privé d’une motivation narrative véritable. Voilà un blockbuster remplissage dont la prétendue confrontation aguiche le client davantage qu’elle n’apporte quelque chose aux deux mythes investis ou à leur représentation au cinéma.


Nous sommes bien arrivés « en terre creuse », pleine de jolies couleurs néons qui figent des colosses dans des poses ringardes et bêtement anthropomorphiques. On attend la director’s cut et le hashtag correspondant (c’est à la mode, n’est-ce pas ?)…

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le 1 avr. 2021

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