Aziz Ansari, qu’on connaît pour son humour affûté et son sens du malaise élégant (Master of None), signe ici Good Fortune, une comédie existentielle où un ange, Gabriel (interprété par Keanu Reeves, oui, lui), décide de chambouler la vie d’un homme riche et d’un autre à la dérive. L’idée, sur le papier, a de quoi séduire : une fable moderne sur la chance, la compassion et la quête de sens dans un monde déséquilibré.
Mais entre le concept et la réussite, le miracle n’a pas lieu. Ansari, à la fois devant et derrière la caméra, tente de jongler entre satire sociale et comédie spirituelle, sans jamais vraiment trouver le ton juste. Sa mise en scène, souvent statique, manque de rythme et d’âme. On sent le réalisateur vouloir philosopher, mais ses dialogues se perdent dans un entre-deux maladroit — ni drôles, ni profonds, juste… tièdes.
Seth Rogen, fidèle à lui-même, offre quelques respirations bienvenues. Son naturel comique sauve plusieurs scènes qui, sans lui, auraient sombré dans la platitude. Keanu Reeves, quant à lui, joue l’ange avec une sobriété presque trop mesurée, comme s’il ne croyait pas vraiment à ce qu’il incarne. Sandra Oh et Keke Palmer apportent une touche d’humanité, mais restent sous-exploitées, victimes d’un scénario trop centré sur la dualité simpliste riche/pauvre.
Côté ambiance, la bande originale oscille entre pop céleste et accords mélancoliques. Rien de marquant, mais elle accompagne correctement les rares moments d’émotion. Le film aurait gagné à s’assumer davantage : oser le burlesque, ou au contraire plonger dans le drame métaphysique. Là, il reste coincé dans une sorte de limbe cinématographique, ni totalement drôle, ni vraiment émouvant.
Aziz Ansari voulait parler d’équilibre entre spiritualité et matérialisme ; il finit par nous livrer une œuvre déséquilibrée, frustrante, qui laisse un goût d’inachevé. Une bonne intention, mais sans bonne fortune à la clé.