Bon, on sentait une tendance légèrement démocrate qui pointait dans le précédent Halloween de David Gordon Green (légère car elle restait au second plan, mais on avait des mâles toxiques punis et un costume inversé, sans parler d'une survivaliste pétrie de troubles mentaux), mais ce n'était rien de méchant, on ne pouvait alors critiquer que l'absence totale de relief dans ce film (pas aidé par la comparaison avec les rob zombie qui l'enterrent question impact) et son échec à tenter de renouveler son sujet qui devenait bien vite une espèce de Match Retour à l'élégante photographie, mais au potentiel horrifique absolument nul (sans parler du sens : l'inepsie des mannequins du dernier acte). Bon, les réseaux sociaux ont été sondés, le projet a été peaufiné et ça y est, David a trouvé la formule. Le renouvèlement est enfin là, il nous faut juste plus de progressisme, assumer la mutation. Cette critique est politique.


Je vous passe l'intro d'un quart d'heure qui reboote le passé en revenant en 1978 sur l'arrestation de Michael Myers, mais pas comme dans l'original. Cette partie n'est qu'un petit exercice de style vintage qui permet de poser un dilemme moral de policier, dont la dramatisation peut sembler absurde dans le cadre d'un serial killer comme Michael Myers, mais qui se révèlera déterminante pour la conclusion.


L'explication de la survie de Michael Myers est un troll : alors que nos 3 protagonistes sont en route pour l'hopital, elles voient passer les pompiers qui vont éteindre l'incendie de sa maison. On n'est pas dans Halloween résurrection, mais question doigt d'honneur au film précédent, c'est quand même d'un bel acabit. Bref, ils ouvrent la cave, quelques jolies scènes avec du feu, du gore, et nous voilà repartis pour le film d'halloween.


Alors j'arrête les spoils, ça pourrait gâcher le modeste plaisir de la découverte. Disons pour rester large qu'il s'agit globalement d'un remake d'halloween 4 (mon préféré avec les rob zombie) qui emprunte quelques éléments du 2 (l'hôpital), mais qui va surtout développer l'esprit de son prédécesseur pour s'approprier enfin complètement le personnage de Michael Myers. C'est avec ce film que Gordon Green sort du film hommage resuçant l'héritage de la licence pour enfin partir sur du neuf. Et qu'est-ce qui est neuf, dans le monde du cinéma d'horreur hollywoodien ? Parfaitement, le Progrès, madame ! Michael Myers devient littéralement (et c'est très explicitement expliqué via des conversations) un "produit de la peur", une entité spirituelle négative qui se nourrit de la peur qu'elle engendre (un peu comme François Cluzet dans l'Homme de la Cave, mais en moins pire). Cela explique ses résurrections, car ça y est, Michael Myers résurrectionne explicitement. Mais surtout, ce discours sur la peur permet de cibler cette Amérique réactionnaire qui vit dans la peur (et qui vote pour l’innommable). D'un côté, Halloween 4 montrait des citoyens qui tentaient de défendre leur quartier et qui commettaient une erreur en tuant un adulte masqué. Mais ici, la peur devient un slogan que tout le monde hurle en allumant des torches. Plusieurs personnes, parents de victimes, lancent un grand nettoyage. Et là, il y en aura plus, des victimes. Toutes les personnes qui sont armées sont celles qui meurent, et généralement avec leur propre arme (compris les réacs ? On ne lutte pas contre la violence avec la violence). Et finalement, comment vaincre Michael Myers devient "Comment vaincre la Peur ?". C'est ce nouvel enjeu qui devient prépondérant, et qui permet de délivrer un message social. Jamie Lee Curtis ne touchera pas un seul flingue dans ce film. Car il faut changer de dynamique. Pour vaincre le Mal, il faut arrêter de faire le mal.


Joli projet. Je pense aussi que si on attrapait le masque de Michael et qu'on le brûlait devant lui, on aurait là une remise en question qui pourrait enclencher une salutaire thérapie.


Je ne suis pas un apôtre de la théorie de l'Ombre, qui transforme Michael Myers en force maléfique surnaturelle inarrêtable. Justement car une menace surnaturelle de cette nature n'est plus terrifiante une fois qu'on a compris son fonctionnement, répétitif. J'étais nettement plus séduit par l'approche psychologique de Rob Zombie, nettement plus émotionnelle et finalement plus humaine malgré l'imposante menace physique (alors qu'un mal immortel est plus dématérialisé question concept). Mais ici, je crois qu'on se fout de nous. J'attends de voir le dénouement du triptyque pour juger, mais cette piste idéologique est si hallucinante qu'on en vient sérieusement à douter de son potentiel divertissement. C'est stupide (on n'arrête pas une violence aveugle avec son idéologie dans la vraie vie), vain (potentiel d'horreur à zéro tout le long du film malgré une insistance sur le gore, c'est toujours trop sage question respect des codes) et insultant (quand on voit comment le scénario insiste lourdement sur ses partis pris idéologiques qui n'ont aucune cohérence dans la réalité et encore moins dans l'univers d'Halloween). Alors c'est toujours bien filmé, il y a une esthétique intéressante (c'est clairement ça qui justifie mon 3, l'esthétique), mais pour le reste, on n'a pas eu de naufrage pareil dans la saga depuis Resurrection. Maman, la suite commence à me faire peur...


Ah, devinez qui vit dans la maison des Myers ?

Voracinéphile
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le 17 oct. 2021

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