J'aime beaucoup le montage et l'ambiance du film. Certaines séquences annoncent déjà le Schrader d'aujourd'hui, avec une volonté d'esthétiser mais aussi de jouer avec le rythme. Ce film est un peu en avance sur son temps en fait. Pas trop non plus, faut pas déconner, et ce n'est jamais que dans le style qu'il est en avance sur son temps, ce qui n'est pas forcément un compliment. Mais disons que c'est intéressant dans le sens où ça consolide la filmo de Schrader.
L'intrigue est intéressante, une sorte d'enquête, comme dans un film noir, dans le milieu du porno. Je ne suis pas d'accord avec tout ce qui est véhiculé dans le film (l'amalgame films pornos et snuff movies est bien facile et maladroit), mais cela n'empêche pas de savourer cette descente en enfer pour ce père de famille. Il est simplement regrettable de terminer le film si proprement quand clairement la fugue de la fille ne pouvait amener un retour à la normale. Les personnages sont bien écrits, on appréciera en particulier le stratagème imaginé par le héros pour retrouver sa fille : se faire passer pour un réalisateur de films pornos. C'est un peu ridicule quand on y réfléchit, mais vu la manière dont le milieu porno est dépeint dans ce film, ça reste cohérent.
Le ridicule est certainement renforcé aussi par le déguisement du père (on joue avec les clichés) mais bizarrement ça passe, peut-être parce que C Scott est excellent dans le rôle de ce père dépassé et prêt à tout pour ramener sa brebis dans le droit chemin (dommage d'ailleurs qu'il ne franchisse pas des limites infranchissables plutôt que juste imaginer des plans un peu tordus). La caméra est bien placée, le découpage lisible, le montage bien rythmé ; certaines séquences en particulier sont assez prenantes, car le réalisateur expérimente davantage avec son médium, avec la dilatation du temps et de l'espace (un peu comme cette bagarre dans la rue). Et puis le travail sonore est assez étrange, met le spectateur dans une position inconfortable.
Bref, chouette petit film. Cela m'a rappelé "8mm" avec Nicolas Cage, faudrait que je le revoie ce film.