Her
7.6
Her

Film de Spike Jonze (2013)

Amour impossible mais probable

On connaît les ambitions de Spike Jonze. On connait également son côté déjanté et son goût pour le risque. Au delà de ses nombreux clips musicaux, le réalisateur américain est notamment connu pour ses travaux pour le moins atypiques tels que Dans la peau de John Malkovich, Adaptation ou encore Max et les Maximonstres. Parfois adulé, parfois décrié, il aura au moins réussi une chose : marquer les esprits grâce à sa faculté de mettre en scène son inventivité si particulière. De par son sujet, son contexte et ses valeurs, Her s'inscrit donc en toute logique dans une certaine continuité, parmi ses précédentes réalisations.

Un homme rongé par sa récente rupture, tombe soudainement amoureux de son ordinateur doté d'une intelligence artificielle hors normes, lui procurant une conscience. En développant minutieusement chaque thème abordé au cours du film, il y a largement matière à livrer quelque chose de nouveau, d'abouti. Les contextes du futur proche et de l'évolution informatique ouvrent nombre de portes, un paquet de boulevards à exploiter pour en tirer ce qu'il y a de mieux et d'original. En clair, les habituelles et débordantes ambitions de Spike Jonze peuvent s'exprimer abondamment comme une pipelette peut s'exprimer face à des muets résignés. Pour ma part, une vague sensation d'inachevé s'est manifestée à mesure que le temps passait. Jonze semble davantage évoquer que développer. Non pas que le travail est bâclé ou les thèmes négligemment abordés. Même s'il s'agit en partie d'un film de science-fiction, on voit bien que là n'est pas la priorité du réalisateur.

S'il excelle dans un autre domaine pour ce film, c'est bien celui de la socialisation, de la relation amoureuse et des différentes émotions qui en découlent. Et le contexte général ne sert que d'outil pour développer et matérialiser son savoir-faire. Car émotionnellement, Her tient en haleine et ravit le spectateur par ses scènes d'un lyrisme surabondant et déroutant, porté par un Joaquin Phoenix épatant. Son personnage rêveur et sincère suscite une véritable empathie de la part du spectateur, virant même jusqu'au transfert émotionnel bouleversant. Il est le pilier même de cette merveilleuse narration, elle-même métaphore abattue de la solitude du futur. D'ailleurs, rien que l'idée d'être seul(e) au milieu de tous fait froid dans le dos.

Même si la question de l'amour envers quelqu'un, ou quelque chose, écrase tout autre thème abordé, Spike Jonze relève son défi avec brio et propose une vision d'un amour du futur emplie de complexité et de frustration mais également débordante de poésie et de sincérité. Malgré l'aspect conventionnel qui ressort discrètement de cette histoire d'amour, le réalisateur a inventé un monde auquel le spectateur se perd entre utopie et dystopie, ne laissant place qu'aux émotions transcendantes, ce qui lui justifie cette singularité si confirmée. Une fois de plus, aimer ou ne pas aimer n'est pas la question. Spike Jonze aura de nouveau réussi une chose : marquer les esprits. Si ce n'est pas ça être artiste...

Créée

le 2 nov. 2014

Critique lue 494 fois

16 j'aime

4 commentaires

langpier

Écrit par

Critique lue 494 fois

16
4

D'autres avis sur Her

Her
Strangelove
9

Siri's paradox.

Looking at the World.Je ne sais pas. Je ne sais pas si c'est moi ou un vrai tour de force, mais ce film m'a ému aux larmes. J'ai ris, j'ai pleuré, je me suis émerveillé devant une telle justesse et...

le 15 févr. 2023

319 j'aime

20

Her
Fraeez
5

New Hipster App Available On Google Play Store!

J’ai un problème, je suis quasi-intolérant au sentimentalisme exagéré. La volonté de vouloir me faire éprouver des émotions en exacerbant toutes les passions produit chez moi une nausée due à un...

le 27 mars 2014

286 j'aime

19

Her
EvyNadler
8

Mauvaise foi

Bon déjà je tiens à préciser que je voulais mettre 5 dès le début. Avant même la première minute. Enfin dès le début quoi du coup. Oui je sais, c'est pas digne d'un critique, c'est pas digne d'un...

le 22 juil. 2014

232 j'aime

21

Du même critique

Black Panther
langpier
6

Je suis ? Je suis ? Euh... Bagheera ?

Le Marvel Cinematic Universe s'est empli d'une sacrée flopée de films depuis si peu d'années. Avec un rythme de deux ou trois sorties par an, la franchise ne fait pas dans la dentelle et parvient...

le 16 févr. 2018

62 j'aime

4

Christine
langpier
10

Les abjections de l'adolescence

Dans leur domaine, Stephen King et John Carpenter s'équivalent. Tous deux maîtres de l'horreur, mais dans leur univers, ils sont deux grandes figures à la renommée internationale, deux emblèmes d'un...

le 30 janv. 2015

33 j'aime

24

Enfant 44
langpier
6

Immersion singulière

2015 voit sortir ce Enfant 44, adaptation du roman éponyme de Tom Rob Smith, sorti en 2008. Un certain Daniel Espinosa, connu sans être vraiment reconnu pour son travail, s'est vu confier la...

le 18 avr. 2015

31 j'aime