Déception grotesque

L'attente se faisait ressentir. Un nouveau film du grand Ridley Scott au casting cinq étoiles mettant en scène l'histoire tragique de la fameuse famille italienne Gucci ne pouvait que faire palpiter le cœur du cinéphile. C'est sans doute pour cela qu'à l'issue de la séance la déception est grande.

Le postulat de départ était pourtant intéressant : présenter aux spectateurs le tournant dramatique qu'a pris l'histoire familiale des Gucci lorsque Patrizia Reggiani s'y introduit. La présence au casting d'une pléiade de stars (Lady Gaga, Adam Driver, Jared Leto, Al Pacino...) dirigée par un cinéaste qu'on ne présente plus aurait dû pouvoir sauver les meubles. Comment est-ce donc possible que tous ces acteurs, talentueux par ailleurs, ne réussissent jamais à nous convaincre ? Pourquoi avoir miser sur des accents à couper au couteau (mention spéciale pour celui de Jared Leto qui ressemble plus à l'accent de Mario qu'à celui de Paolo Gucci) qui n'ajoutent rien à l'intrigue sinon un pathétisme déjà omniprésent ? Il est clair que Ridley Scott ne souhaitait pas dépeindre l'histoire des Gucci en fonction de la grandeur triomphale de la famille mais bien au contraire par rapport à leurs vicissitudes. En cela le film est catégorique : il s'agit d'une famille grotesque et exubérante que seule une satire pouvait donc retranscrire. Cette idée est d'ailleurs pertinente et originale mais elle est bien seule dans cet océan prosaïque. Parfois seulement le cinéaste semble se réveiller pour nous offrir quelques belles idées de mises en scènes, on pense notamment au cri du personnage joué par Adam Driver étouffé par un bruit de klaxon qui atteste de façon explicite du ridicule des protagonistes. Le reste du temps le film est plat, la décadence voulue aurait dû être perceptible à l'intérieur de la mise en scène en elle-même, Ridley Scott aurait dû avoir un véritable regard de cinéaste au lieu de compter essentiellement sur ses acteurs pour faire le job qui sont donc, par là même, galvaudés. La bande originale elle aussi fait preuve d'une œuvre décousue : variété italienne, opéra, pop américaine, musique classique… tout y passe et compromet de nouveau la cohérence du film.

Il semblerait que le film ait été réalisé avec une semaine d'avance sur le plan de travail, House of Gucci aurait-il donc été bâclé pour contenter la MGM qui souhaitait coûte que coûte sortir ce film en 2021 à savoir le centenaire de la création de la marque Gucci ? L'attente se faisait ressentir mais n'aura pas été comblée.