Longtemps avant que Marvel monte sa structure de production pour nous abreuver d'aventures extraordinaires autour d'une galerie de super-héros tous plus puissants les uns les autres, et fort des succès de ses implications dans le cinéma grand spectacle du début des années quatre-vingt, Georges Lucas acquiert les droits d'un comics mineur qui joue de l'absurde et d'un humour graveleux et débridé qui met en cases un canard venu des confins de l'espace : Howard The Duck. Le film accuse visuellement son âge, d'une époque où les effets visuels conçus par ILM sont encore difficilement incrustés aux prises de vues réelles. Pour autant, le métrage expose 


une créativité débordante



et trouve le ton juste à l'adaptation, tout aussi absurde et tendancieux que le matériau originel.


Scénario confié à Willard Huyck, qui réalise également le film, et à son épouse et partenaire d'écriture  Gloria Katz, où l'on suit le désarroi de ce canard exilé par accident qui cherche le moyen de rentrer chez lui jusqu'à ce qu'une monstrueuse menace débarque à son tour des tréfonds de la galaxie, promettant chaos et destruction à la surface de notre bonne vieille terre. 


Entre humour et romance, entre pastiches et hommages,



la narration devient prétexte à l'expérimentation pour les techniciens d'Industrial Light & Magic : luminescences électriques et figurine de monstre animée en stop-motion, on pense évidemment à Star Wars sur la forme, on est plus proche des délires de Mel Brooks sur le fond. Il faut aussi souligner là l'impressionnante séquence de poursuite en ulm, cascades millimétrées et sensations fortes, où l'humour du héros volatile continue d'enlever



une forme de légèreté séduisante.



L'agréable surprise du métrage, ce sont les comédiens. Si Lea Thompson fait l'ingénue avec sincérité, endossant avec une belle conviction l'absurde accepté du postulat, ce sont surtout Tim Robbins et Jeffrey Jones qui y brillent d'exacerbations magnifiques. Le premier interprète un laborantin surexcité par la présence de l'alien mais qui perd tout sens du contrôle dès que l'aventure l'emmène hors du confort de son espace de travail, 


panique aérienne superbe, évanouissement mémorable,



il y imprime un sens de l'humour qu'on ne lui connaissait guère. Le second prend visiblement un plaisir énorme à endosser deux rôles au sein d'un même corps : le scientifique calme et dévoué se laisse peu à peu dévorer par l'intrus qui lui dévore les entrailles, maquillage évolutif gore, un travail impressionnant sur la voix (évidemment renforcé par les effets du mixage) et suffocations angoissantes, le panel proposé démontre tout le talent de l'acteur, pur cadeau.


Sans jamais se prendre au sérieux, Howard The Duck livre un pur divertissement et si l'échec critique fut au rendez-vous lors de sa sortie, si virulent qu'il entraîna la désertion d'un public ne souhaitant pas se retrouver stigmatisé par la fréquentation inappropriée des salles obscures qui osaient le diffuser, le film découvert aujourd'hui n'en méritait probablement pas tant. Certes les effets jurent, mais le costume du canard fait


le réel plausible



et l'humour omniprésent lorgne là plus vers la comédie effrénée que vers le spectaculaire engagé : il faut parfois reconnaître l'importance et la réussite des pires nanards du cinéma, Howard The Duck est de ceux-là qui se révèlent cultes trente ans plus tard. Petit plaisir volatile d'humour gras et déplacé.

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