Les films où le personnage principal est au bord de la crise de nerfs ou proche de de l’explosion sont souvent jubilatoires. Comme si, en lieu et place de LA séquence de terreur dans un film d’horreur ou de celle la plus spectaculaire et souhaitée au sein d’un film d’action, le pétage de câble dudit personnage était le moment attendu entre tous après une montée en tension souvent crescendo. Ce type de productions peut prendre bien des formes, du film social comme le récent et tricolore « À plein temps » où Laura Calamy courait partout pour subvenir aux besoins de sa famille dans un équilibre précaire ou encore le cultissime « Chute libre » de Joel Schumacher qui voyait Michael Douglas prendre les armes pour cracher sa haine du système au sein d’un thriller étouffant.


Avec « Si j’en avais la force », Mary Bronstein prend le chemin du drame psychologique même si la manière dont le film est tourné ainsi que le rythme et l’ambiance s’approcheraient presque du thriller. Malgré quelques pointes d’humour – souvent noir, on est face à une œuvre sombre et anxiogène. La réalisatrice filme le burn-out mental et physique progressif de son personnage principal de manière réaliste et graduelle en le versant dans une atmosphère presque glauque. Le rendu est excellent et les séquences de stress pour le personnage s’enchaînent avec une belle fluidité et nous happent. On regrette juste les digressions allégoriques trop forcées (les trous, celui au plafond et celui dans le ventre de sa fille malade représentant le puits sans fond dans lequel elle s’enfonce) et qui virent parfois au surnaturel ou onirique. C’est un peu lourd et maladroit mais surtout inutile.


Ce type de productions doit en général beaucoup à l’interprétation du personnage qui pète les plombs. Et la géniale Rose Byrne, actrice tout-terrain au possible allant du film d’horreur (la saga « Insidious ») au blockbuster (« X-Men, le commencement ») en passant par la comédie (« Mes meilleurs amies » et une foultitude de films d’auteur, livre probablement – et comme le scande l’affiche à raison – la performance d’une vie. Elle empoigne le rôle de cette mère à bout de course dont les nerfs lâchent peu à peu avec un aplomb et une conviction incroyable. Elle est directement en lice pour les cérémonies de récompenses. On ne voit qu’elle et c’est tant mieux tant son jeu est parfait. On apprécie aussi les apparitions du rappeur A$ap Rocky, qui confirme après le pourtant très mauvais « Highest 2 Lowest » qu’il est bon acteur.


Le film dure près de deux heures mais le rythme ne faiblit pas et les agressions du quotidien telles que le montrent le film sont réalistes parce que commune à la vie de tout un chacun. Et ici c’est leur accumulation progressive mais jamais improbable qui font monter la sauce et le ras-le-bol de cette mère solo. Filmée dans un cadre triste au possible (on est pourtant dans la ville chic et balnéaire de Montauk), le film distille une angoisse sourde comme celle que ressent le personnage. En filigrane, on pointe du doigt la santé mentale défaillante due à une charge émotionnelle trop intense dans tous les aspects de la vie. Le décrochage est filmé avec acuité et pointe du doigt nos sociétés où on est surchargé moralement, mentalement, professionnellement, au niveau familial, etc. On peut juste regretter que le fameux moment attendu ne soit pas aussi dingue et cathartique qu’espéré avec cette fin en demi-teinte. C’est le prix à payer pour une trame qui tente de rester réaliste mais c’est un chouia frustrant.


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JorikVesperhaven
7

Créée

le 23 oct. 2025

Critique lue 10 fois

Rémy Fiers

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