Le sujet est des plus classiques, mais il pouvait donner lieu à quelque chose de sympathique, avec l'illusion du terrorisme utopiste qu'il charrie, de cette purge pour le bien de l'humanité. Et Ron Howard à la barre pouvait rassurer, si l'on se souvenait de son formidable Rush et son très bon Au Coeur de l'Océan.


Hélas, c'est un peu vite oublier que le bonhomme, c'est aussi le Da Vinci Code, avec sa révélation la plus nullissime de tous les temps, et un Anges et Démons qui lorgnait vers le nanar triple A agréable. De là à penser que Ron Howard perd tous ses moyens devant une adaptation d'un bouquin de Dan Brown, il n'y a qu'un pas... Sentiment que Inferno confirme malheureusement.


Les capacités du réalisateur ne sont pas à remettre en cause, même si son art, ici, est un brin paresseux et fonctionnel, purement illustratif de la trame qu'on lui donne à animer. Mais c'est ici que le bas blesse cruellement. Car Inferno prend prétexte de la baisse de forme de son personnage principal bien connu pour faire avaler une intrigue aux vagues saveurs de poursuite et totalement cousue de fil blanc. Au point que le pauvre Robert Langdon, trahi, se voit ravalé, pendant la quasi totalité du film, en simple guide touristique de luxe, ou en véritable VRP de la culture italienne, au choix. Les plans façon cartes postales des différentes villes traversées renforcent cette impression déjà tenace, tandis que notre expert se débat plus avec sa mémoire qui flanche qu'avec les deux malheureuses énigmes qu'ont lui met sous le nez. Et il est à ce point diminué que son sidekick, la toujours ravissante Felicity Jones, se fade le plus gros du travail. Le comble, au vu de ses capacités étalées dans les deux films précédents...


Si ce n'était que cela. Car Inferno s'avère, cerise sur le gâteau, totalement incohérent et what the fuck dans l'agencement des éléments de son scénario, assénés de manière totalement arbitraire dans une chronologie des faits qui laisse pantois. Si cette impression de grand n'importe quoi pouvait paraître fun dans Anges et Démons, ici, elle commence par faire lever les yeux du spectateur au ciel, avant que celui-ci ne s'agace profondément, puis d'abandonner l'affaire en cours de route, tellement Inferno se présente comme une lamentable fête à neuneu laxiste et totalement je-m'en-foutiste. Même si Ron Howard, derrière la caméra, fait en sorte qu'aucun temps mort ne vienne parasiter son film, le spectateur qui n'en croit pas ses yeux ne pourra que compter le nombre de coïncidences heureuses, de facilités et de portes miraculeusement ouvertes qui le parsèment. Il apprendra aussi que les musées italiens,ce sont des vrais moulins et que l'on peut piquer une oeuvre d'art incognito sans même déclencher une alarme...


Il en sera de même avec certaines réactions du pauvre Langdon, qui ne se pose même pas la question de savoir pourquoi quelqu'un qu'il ne connaît ni d'Eve ni d'Adam lui colle aux basques. Ou quand il informe par exemple en toute connaissance de cause son poursuivant, qui ne lui veut donc pas du bien, de sa prochaine destination. Ou encore de son expression de surprise alors qu'il se trouve sous terre, et que le retournement de situation auquel il fait face est évident depuis sa première vision de cauchemar... Ces dernières, qui auraient pu être prétextes à quelques jolies images de fin du monde artistiques, ne seront que brèves et pasteurisées, noyées en outre dans un numérique maladroit qui navigue dans les couleurs utilisées entre l'orange passé et le jaune pisse. Quel dommage...


D'autant plus que l'aventure ne lambine pas en route et emprunte pour son climax un lieu atypique et très cinégénique, même si Inferno trouve encore le moyen de le torpiller dans un gag aux accents très Tex Avery, ou quand il y fait entrer des special ops... Pour les faire observer le combat final dans un suspense ultra artificiel. Il peut aussi se targuer de faire évoluer la très jolie Felicity Jones, un des uniques rayons de soleil du film, faisant vivre de sa beauté le seul personnage (un petit peu) travaillé du film, même si celui-ci , dans son évolution, se voit venir de loin. Oui, je suis faible. Oui, le masqué a un petit coeur mou de caramel quand il la voit à l'écran, certes. Mais il lui reste assez de sang dans le cerveau, aussi, pour se rappeler que l'amnésie n'est pas une excuse pour se foutre de la gueule du monde et du spectateur qui a payé sa place. Certains auraient dû s'en souvenir avant d'écrire avec les pieds pareil scénario, se payant même le luxe de filer à ce pauvre Robert Langdon, qui n'en demandait certainement pas tant, une ancienne love story fadasse et qui n'apporte strictement rien au récit. Car si cela n'avait pas été David Koepp, j'aurais été à deux doigts de lui dire, à ce scénariste, d'aller brûler en enfer, tiens. Ca lui aurait fait les pieds.


Behind_the_Mask, Felicity... Aussi.

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