Depuis ses tout débuts, Tarantino a toujours recyclé les recettes des films d'exploitation du XXe siècle (pour résumer, ces films étaient des tabloïdes version cinéma) en en faisant des films grand public. Son apologie de la violence, néanmoins tout en finesse cinéphile, n'est plus à démontrer. Il était donc logique qu'il s'attaque à la nazisploitation, et qu'il le fasse alors qu'il a atteint une grande expérience car la sensibilité des gens 68 ans après la seconde guerre mondiale, est encore vive. Fort de sa popularité, il a décroché un casting de rêve pour faire un film ô combien divertissant. Il est pourtant parti avec des défis importants à relever : premièrement gérer le clash entre son univers habituel décalé et le sérieux du sujet, et deuxièmement comprimer en un long-métrage ce qui devait être à l'origine une série. L'un et l'autre de ces défis ont été relevé avec plus ou moins de bonheur. Par exemple le cabotinage des meneurs nazis (Hitler, Goebbels...) digne d'un Chaplin n'a aucune commune mesure avec le sérieux méthodique et sadique d'un Hans Landa. Le fait que deux histoires se déroulent en parallèle (celle des bâtards et celle de Shosanna/Emmanuelle Mimieux [Mélanie Laurent]) sans vraiment se recouper empêche aussi le film d'avoir une bonne structure globale. Qu'à cela ne tienne, le film a aussi des gros atouts. Au premier duquel son internationalisme, avec des acteurs parlant leurs propres langues, et comment Tarantino, toujours si minutieux dans la torture verbale, en fait ici une partie intégrante du suspense. Sa façon de présenter les différents camps sans partialité aucune, en se payant même le luxe de mettre en avant non pas Brad Pitt, mais Christoph Waltz, complètement sacralisé en méchant sadique qu'on adore haïr. La maturité de sa mise en scène enfin, et de la tension psychologique qu'on avait déjà aperçu dans Pulp Fiction ou Kill Bill, mais qui est ici beaucoup plus aboutie. Le Commando des Bâtards (titre québecois) est le film de la maturité pour Tarantino, et un des meilleurs films américains de ces dernières années.

filmdeouf

Écrit par

Critique lue 1.6K fois

D'autres avis sur Inglourious Basterds

Inglourious Basterds
Hypérion
8

Tarantino, polyglotte à dessein

Après le décrié Boulevard de la Mort, qui ne s'apprécie pleinement qu'intégré à la pellicule de Grindhouse, Tarantino s'est lancé avec un enthousiasme évident dans son western sur trame de seconde...

le 21 nov. 2011

105 j'aime

8

Inglourious Basterds
fifi_
2

Critique de Inglourious Basterds par fifi_

Il y a longtemps, Quentin faisait des films. Il faisait Reservoir Dogs, c'était pas mal, un peu surestimé mais pas mal. Il faisait Pulp Fiction, c'était mieux, toujours surestimé mais mieux. Il...

le 25 juin 2010

94 j'aime

56

Inglourious Basterds
Grard-Rocher
8

Critique de Inglourious Basterds par Gérard Rocher La Fête de l'Art

En pleine occupation allemande la famille Dreyfus vaque à ses activités dans leur maison retirée du village lorsque des soldats allemands débarquent. A leur tête le colonel Hans Landa.Cet homme est...

92 j'aime

14

Du même critique

Two Lovers
filmdeouf
5

Le cul entre deux chaises

J'avais peur que ce Two Lovers soit ou bien un film cul-cul ou bien quelque chose d'outrageusement auteurisant. Mais ce n'est pas là que le bât blesse, on a pas là un film bateau, il y a un projet,...

le 10 avr. 2016

21 j'aime

3

Raisons d'Etat
filmdeouf
10

L'anti-Jason Bourne

Calez-vous dans votre fauteuil, Raisons d'état prend son temps, et ce n'est pas un film qui séduit son spectateur par des artifices scénaristiques tape-à-l'œil, des rebondissements spectaculaires, un...

le 13 juil. 2017

15 j'aime

Chouans!
filmdeouf
7

Liberté liberté chérie !

Quand je critique des films historiques, je dis tout de suite que je ne suis pas assez savant pour juger de leur exactitude historique. D'ailleurs, peu importe, c'est un film avant tout. Chouans! est...

le 11 avr. 2015

11 j'aime