(...) They Live ( Invasion Los Angeles ) de ( Big ) John Carpenter, tourné en 1988 (...) instaure dés le début du film un climat social en faisant de son personnage principal, john Nada, un honnête travailleur américain, une victime de l’expansionnisme américain, devenu sans abri suite à une vague de chômage. Le réalisateur prend alors le temps de présenter les différents personnages, tous des parias vivant dans un bidonville, appelé non sans humour Justice Ville, devenus finalement coupable d’être dans la condition dans laquelle la société américaine les a placés en les délaissant totalement. Cette première partie plutôt lente est alors brisée par une scène d’action urbaine d’une violence terrible et tragique dans laquelle les forces de l’ordre envahissent Justice Ville complètement arbitrairement, dépeignant ainsi un portrait sombre d’un état répressif censé nous protéger. John Nada découvre alors que ce bidonville abritait une société secrète voulant révéler la vision réelle de notre société moderne asservie par une race extraterrestre s’enrichissant sans vergogne, nous gardant dans l’obéissance et la soumission la plus totale grâce à des messages subliminaux dissimulés derrière chaque panneaux publicitaire, chaque pages de magazines, ou même chaque billets de banque. La séquence dans laquelle il passe les lunettes de soleil pour la première fois, qui agissent comme un filtre révélateur, est d’ailleurs très efficace par sa simplicité mais également son inventivité, mélangeant ainsi des séquences couleurs et noirs et blancs. Dés cette découverte, John Nada part en chasse contre l’alien, fusil à pompe à la main et répliques qui tue aux coins des lèvres. De cette violence fun dans laquelle il dézingue de l’extraterrestre naît une analogie avec le réalisateur lui-même, rentré en guerre contre une machine hollywoodienne dont le seul but est l’argent, à l’image de ce qu’il y a marqué sur les billets de banques lorsque John Nada porte les lunettes : « Ceci est ton Dieu » ! Toute cette haine contre l’establishment, Carpenter le doit entre autres à l’échec commercial injuste de son précédent film, Big Trouble in Little China en 1986. La société Alive lui confie alors un petit budget et lui laisse carte blanche, et le réalisateur s’en donne à cœur joie. En jonglant constamment entre plusieurs registres, sans jamais tomber dans le ridicule, et en y ajoutant un discours frontal profondément anti-capitaliste et anti-consumériste jamais subtil et qui énonce tout clairement, Big John fait de cette série B une œuvre majeure de la science-fiction américaine, qui même après l’avoir vu et revu reste tout autant efficace. Finalement, John Carpenter nous dit, comme le fait son héros dans le film :

I have come here to chew bubblegum and kick ass… and I’m all out of bubblegum !

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le 30 nov. 2014

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Victor Tsaconas

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