David Robert Mitchell sait y faire, et s'assure de happer le spectateur dans son œuvre dès les premières minutes. Pour cela, la bande-son se transforme en personnage à part entière de ce film d'horreur, rappelant les expérimentations sonores de John Carpenter, mais aussi les plus récents films d'Adam Wingard ou le remake de Maniac, baignés de nappes SynthPop fantasques, ou encore les distorsions insidieuses d'Under The Skin. Une bande-son d'exception, qui donnera certainement plus de frisson que le long-métrage en lui-même. En prime, la mise en scène est ultra-soignée et impose avec force ses travellings et plans séquence angoissants, renforcés par une superbe photographie de couleurs et géométries. Il y a cette ambiance étrange qui se crée, de cette caméra constamment centrée sur ces adolescents, cadrés avec douceur et empathie, dans une époque jamais indiquée mais au feeling rétro des années 70-80. On ne peut s'empêcher d'y trouver un certain charme, un petit air des Goonies, mais surtout d'un Donnie Darko, avec cette atmosphère presque fantastique, envoûtante et unique.

Dans cette banlieue américaine mystérieuse, Mitchell défie alors son spectateur de remarquer l'élément dérangeant dans ses compositions visuelles, tandis que la pellicule devient plus anxiogène, à l'approche d'une menace presque invisible qui avance inlassablement sous des formes effrayantes, dans le style d'un Mister Babadook. Sauf que le réalisateur joue trop longtemps avec son public, sans forcément le récompenser. De ces séquences progressives, on attend, ou plutôt on espère, la véritable montée en puissance angoissante jusqu'à un finale marquant. Et, outre des scènes superflues, on a beau apprécier le travail esthétique, les suggestions de présence, Mitchell finit par se répéter, tombant dans des "affrontements" décevants rien que dans le principe, et des jump scares faciles. Il reste des séquences oppressantes et de tension réussies, notamment de par le travail sonore remarquable, et cette atmosphère irréelle étouffante, mais le bouleversement espéré ne survient pas. Le réalisateur poursuit son œuvre monotonement, laissant sa mythologie proliférer sans trop d'effort. Devant It Follows, le spectateur est finalement trop libre, essayant d'interpréter, de rapprocher certaines métaphores trop évidentes, tout en étant bloqué dans un slasher simplement stylisé.
AntoineRA
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Films vus au cinéma, Mes Blu-Rays et Les films aux meilleures bandes originales

Créée

le 6 févr. 2015

Critique lue 283 fois

1 j'aime

AntoineRA

Écrit par

Critique lue 283 fois

1

D'autres avis sur It Follows

It Follows
Kogepan
8

Miii ._. (ou : les aventures d'une souris devant un film d'horreur)

Je ne regarde pas beaucoup de films d'horreur. J'ai les bases, j'aime bien occasionnellement me poser devant un bon gros film terrifiant avec une bière, un coussin (très important, le coussin) et mon...

le 11 févr. 2015

134 j'aime

9

It Follows
Velvetman
8

Only monster forgives

Où sommes-nous ? Ce bruit assourdissant, dissonant, qui nous parvient à la vue de ce quartier pavillonnaire tout droit sorti de Blue Velvet ou Donnie Darko. Une jeune adolescente peu vêtue sort de...

le 5 févr. 2015

117 j'aime

8

It Follows
Sergent_Pepper
7

Suivre et survivre

C’est sur un éblouissement propre à séduire le cinéphile peu connaisseur du genre que s’ouvre It Follows : une superbe leçon de mise en scène. Le plan séquence initial, tout en lenteur circulaire,...

le 15 juin 2015

116 j'aime

11

Du même critique

Caldera
AntoineRA
9

Critique de Caldera par AntoineRA

Il y a des jours, comme ça, où on tombe sur des courts-métrages d'orfèvres. C'est le cas de Caldera, découvert via une news sur le site Allociné. Réalisée par Evan Viera, l’œuvre a déjà récolté...

le 5 avr. 2013

14 j'aime

2

Minutes to Midnight
AntoineRA
7

Critique de Minutes to Midnight par AntoineRA

C’est étrange comment on peut en venir à renier, voire haïr un groupe pour, la majorité du temps, se faire bien voir parmi la communauté Metal. C’est le cas de LINKIN PARK. Le nom vous donne des...

le 27 oct. 2012

14 j'aime

Marvel's Daredevil
AntoineRA
8

Critique de Marvel's Daredevil par AntoineRA

• SAISON 1 (9/10) [Critique du 1 mai 2015] Très loin de la mièvrerie, du fan service forcé, et du kitsch cheap et Disney-ien des films de Marvel depuis Avengers, Daredevil a su s'émanciper de ces...

le 1 mai 2015

13 j'aime

2