La chanson de la Burne


Retrouver la Burne après tant d'années d'abstinence forcée, c'est chaud.
C'est un peu comme retrouver un pote qu'on a perdu de vue sans se souvenir pourquoi. T'es là, souriant comme un connard, "ça va, la famille? Tu bouges pas, c'est un truc de malade, tu bouffes toujours tes crottes de nez ?"
Et bim, une effluve et tu te souviens dans un flash qu'il puait de la gueule et t'es de ces personnes qui ne supportent pas cette engeance!
D'où bannissement jusqu'à ce que ce type n'ait plus de bouche et là, c'est pas ton jour de chance, tu tombes sur sa gueule. Et il la ferme pas. T'as envie de te barrer mais c'est un vieux pote, rencontré par hasard, tu sens dans son regard que de son côté il est trop content de te gazer. Le mec est heureux. Si tu voyais sa queue, je suis sûr qu'elle remuerait. C'est pour dire.
Donc tu restes. T'essaies de deviner ce que peut bien bouffer un mec qui schlingue de la sorte, genre des vautours qu'il laisserait macérer 6 mois dans une cuve de Zizi CoinCoin, une boisson Belge interdite hors de leurs frontières.
T'essaies de faire ton Jacques Mayol, tu veux battre ton record d'apnée. Tu donnes le putain de change.
Si t'avais du courage et aucune fierté, tu lui dirais. "Tu pues Ordure ! T'as toujours pué du bec, bordel ! Je te déteste. Tout le monde te déteste. Faut que tu boives du Paic, mec"


Mais t'as pas de courage et puis surtout, t'as de la fierté. Tu sais ce qu'est la douleur de croiser quelqu'un que tu admires, pour qui tu vendrais un frère, tu le donnerais même! Et cette personne de t'ignorer malgré tes "Je vous aime, Monsieur Schwarzenegger, vous êtes beau comme un membre en érection". Et le mec de te sourire avec ses putains de dents du bonheur, avec un cigare coincé dedans, et de continuer sa route. Alors que tu viens de passer pour une fiotte auprès de toute la populace alentour.
Ouais, enfin, tu vois que quand je dis que j'ai de la fierté, j'ai pas toujours eu du stock.
Mais aujourd'hui c'est plus pareil, j'ai changé. Ne fais pas chez autrui si tu veux pas choper la chiasse, comme on dit.
Enfin, tu vois ce que je veux dire.


Donc je suis resté. Fier, droit couché dans mon canapé, à la berbère-mayennais, un cône épicé pour faire passer la pilule et quelques églantines à déguster si j'ai la dalle. Propre.


Bon là, fini les salamalecs, ils annoncent la couleuvre d'entrée, le film s'appelle «Jason LaBurne». Plus d'histoire de mémoire dans la peau de balle de la mort qui tue. Terminées, ces conneries. C'est du scénario solide, là, Matt Damon a mis la main à la pâte!


En vieillissant, la Burne a pris du volume. Lui qui, jadis, ballottait aux quatre coins de la planète, à tuer des gens en se demandant qui il pouvait bien être, a arrêté les voyages et subsiste en faisant de la bagarre.
Alors, laisse tomber.


Au début, il est dans un camion quelque part en Grèce, où ça sent quelque peu l'albanais, avec des mecs tout basanés et tatoués. D'emblée ça sent le traquenard. Soudain, ils arrivent à destination et sur place il y a d'autres mecs, mais torses nus. Hum hum hum, j'ai envie de dire. Du coup, la Burne enlève son t-shirt. Les musclés s'enroulent des genres de rubans autour des phalanges en faisant des moues gourmandes.
Je ne vais pas te mentir, à cet instant j'ai eu peur que ça glisse en fist-fucking et en fait non, carrément pas. Jason ne veut pas et allonge d'une mandale le premier gourmand qui s'approche de sa pastille avant même qu'il ne se pourlèche les babines.
Faut pas trop l'asticoter, la Burne, il n'aime pas trop ça.


Le méchant, c'est Tommy Lee Jones. J'aime bien la Jones. Je te dis pas comment son visage est tout strié de crevasses... On dirait Jeanne Moreau. Et puis, ça doit être tellement tuant de porter des valises tout le temps que j'ai un profond respect pour ce mec. Bon là, c'est de l'ordure de première, du fils de pute assermenté par le gouvernement américain.
Sa collègue est brune et elle est jouée par le robot d'Ex Machina. J'aime bien aussi. On sent qu'elle est tenace comme un pet d'après kebab. Elle porte un chignon qui, du point de vue d'un chauve, me semble extrêmement travaillé. Elle est méchante mais en fait elle est gentille. Je sais, c'est pas simple, mais il y a plus salé.
Il y a un méchant, genre celui que rien n'arrête, un terminator mais frisé. Et devine, il est interprété par Vincent Cassel. Oui, le Vincent Cassel.


Donc, au début, tout va bien, la Burne fait du fight club avec les copains, et plus si affinités, sans qu'on l'emmerde. Sauf que la blonde qu'était plutôt mignonne dans les films d'avant lui donne rendez-vous dans une manif de mélenchonistes grecs. T'es mal à l'aise pour lui. Il se dit «Si y'a moyen de moyenner... » et il y va.
Mais les méchants ne sont pas dupes, ils ont envoyé leurs sbires et la Cassel sur place. Sauf que la Cassel n'est pas le plus rapide de sa génération, tout le monde le sait.


On voit la Jones qui regarde des écrans, des télés, l'air soucieux et tout à coup, il reconnaît la Burne, là, au milieu des Insoumis. Il a l’œil, la Jones, même si, en vrai, c'était facile, il est presque intégralement épilé, la Burne, contrairement aux autres communistes là, tout plein de poils et de bière.
À un moment, la Burne, se sentant acculé, vole une moto à un flic. Faut le faire, même si c'est la police, grecque de surcroît, on sent bien que les amerloques s'en branlent des autres, que notre vaste monde n'est qu'un putain de terrain de jeu pour ces cons. Je te dis pas comment ça m'a foutu en rogne.
Ensuite, la Burne et la blonde s'en vont sur la moto volée, poursuivis par la Cassel, enfin arrivé sur site, en Volkswagen. C'est pas une flèche, la Cassel, ils l'appellent tous l'Atout, c'est parce qu'il est marseillais. Sauf qu'il a le bon goût de ne pas avoir l'accent.
Ils conduisent vachement vite dans les rues bondées, c'est totalement terrifiant. Les Insoumis, courroucés par l'outrecuidance de ces gens qui s'amusent à faire la course au milieu d'eux qui manifestent, envoient un cocktail Bogdanov sur la voiture de l'Atout qui s'emplafonne dans le premier mur venu.
Je te dis pas l'image des conducteurs français avec des trucs comme ça, on sait pas conduire dès que notre caisse s'enflamme...bientôt, ils vont nous dire qu'on peut pas picoler avec une paille par le trou de balle. Si si, bientôt, tu vas voir.


Bref, comme la Brune (pas la Burne, suis un peu steuplé) c'est un robot, je te le rappelle, elle dit à notre con patriote que « Voilà, c'est pas grave s'il sait pas bien conduire, toussa, mais que s'il monte sur le toit il pourra quand même les tuer ».
La Cassel lui rétorque que « T'as vu, t'es gentille, machine, mais je viens d'avoir un méchant accident de la circulation. Faut arrêter, c'est un accident du travail, vous allez douiller, les prud'hommes, toussa ».
La Brune, elle lui répond que « Non, pas depuis le président Macaron, c'est fini, ces conneries, tu bosses ou tu crèves! ».
Il lui répond « Okay, c'est où que je dois monter ? »


Arrivé sur le toit, il bute deux-trois lascars qui se faisaient un barbecue, tranquilles, et s'installe, fusil à lunette posé sur son œil globuleux et attends que la Burne et la Blonde soient en ligne de mire.
Comme c'est toujours les femmes qui meurent dans les "la Burne" précédents, tu supputes que c'est encore elle, la pauvre, qui va calancher. Elle même le sait, c'est dire.
Le sens du sacrifice, l'abnégation, le courage de ces bêtes-là, ça m'a carrément chamboulé. À un moment, je me suis même dit que c'était pas juste, la CIA, les satellites, les ordinateurs, les marseillais, les robots : c'est pas juste. La Burne, lui, il n'a que sa bite.


Mais là, les méchants, ils l'ont chauffé sévère. La Blonde, la Burne l'aimait bien, elle était bonne. Il est tellement triste qu'il a envie d'écouter du Ben Harper, un mec qui murmure, pour ne pas trop réveiller ce qui pourrait pleurer en lui. C'est furtif comme moment, mais c'est beau.


Cependant, juste avant de rendre son dernier souffle, dans un geste aérien, la Brune a envoyé une clé dans sa direction.
Comme la Burne est plus malin que la moyenne, il comprend que c'est celle d'un casier dans une gare.
Dans le casier, il trouve une clé USB qu'il s'empresse de cacher dans son anus en se disant "il n'est pas né celui qui va venir la chercher" et il se rend en Allemagne où un mec l'aide à lire ce qu'il y a dessus vu que lui, les conneries comme l'informatique, il n'y entrave que dalle. L'allemand est fourbe, tout le monde le sait et, profitant que la Burne consulte les dossiers, il l'attaque par surprise avec une haltère. La Burne, il prend un pied de chaise et lui défonce sa sale gueule de mangeur de saucisse fumée.


Après, Jason part pour l'Angleterre, parce qu'il aime trop les voyages en fait, mais faut le voir, la Burne est grave travaillée car elle a vu dans les dossiers classifiés «Faut que personne y jette un oeil» qu'il y avait sur la clé USB que son père était un enculé.
Il n'a rien contre les sodomites, mais que son géniteur mange de ce pain là, ça lui donne le tournis.


À un moment, tu découvres que la Brune, elle est gentille. Incroyable en fait, elle bosse avec le méchant, la Jones, elle a mis un virus dans la clé pour qu'on retrouve la Burne, elle veut littéralement le tuer en fait, mais non, elle a dû voir dans son regard que c'est un tendre qui s'ignore, qu'il a besoin de câlins et elle, elle aime bien faire des câlins.
La Burne compte pas pour des prunes .


À Londres, la Burne tombe de cinq étage et la Brune, désormais son obligée fantôme, l'aide.
Après, La Burne porte une casquette. Ce qui n'est pas évident, je ne sais pas si tu as déjà essayé de mettre une casquette à une burne, normalement ça tient pas.


À la fin, tout le monde se retrouve à Las Vegas, à la maison, à l'Amérique.
Alors là, c'est plus l'escalade, c'est la chute libre. La Jones, qu'est une sale petite pute de manipulateur, décide de tuer la Brune qui, il le sait, envoie des SMS en cachette et si on peut sceller le sort de cette pourriture de Jason la Burne par la même occasion, il pourrait presque dessiner un sourire sur son visage plissé.


Sauf que la Cassel, c'est quand même un blaireau et la Burne devine où il est caché et lui tire une balle en plein dans son anus. Il s'en tape, il n'a jamais aimé s’asseoir de toutes les façons.


Après, c'est la guerre en civilisation, ça se tire dessus, ça se poursuit en véhicule du SWAT, à contre-sens, ça passe par les parkings pour s'arrêter dans le Riviera.
J'ai bien aimé l'image derrière tout ce fatras : un homme seul, s'il est habité d'une volonté sans limite, de celle qui font s'envoler les girafes, peut faire fléchir ceux qui veulent dominer le monde. Et finir sa nuit au bras d'un bandit-manchot.


Bref, à la toute fin, j'ai cru voir La Burne faire un clin d’œil à la caméra, en se grattant la couille.


Enfin voilà, ça puait de la gueule.

DjeeVanCleef
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le 14 mai 2017

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