Lieu inédit et hypnotique pour ce thriller qui nous cueille malgré quelques maladresses.

On entre de plein pieds dans ce thriller mâtiné d’une pointe de drame et d’un soupçon de romantisme grâce à la réalisation très millimétrée de Michael Pearce. Il parvient à instaurer grâce à quelques notes de musique étranges et malsaines et des plans bien carrés aux travellings lents et mystérieux une ambiance peu commune et intrigante. Mais, surtout, en filmant l’île de Jersey sous toutes ses coutures sans que cela fasse pour autant dépliant touristique, il nous offre un décor de cinéma quasiment inédit sur grand écran. Le côté insulaire de Jersey et de ceux qui la peuplent amène une atmosphère singulière et indescriptible à cette histoire à la croisée des genres. De plus, on ne peut nier que les paysages battus par les vents et filmés dans la douce lumière de l’été de cette île appartenant à l’Angleterre mais près des côtes normandes ajoutent à la beauté des images de « Jersey Affair ».


Mais revenons-en au film en lui-même. En choisissant de filmer deux personnages principaux psychologiquement instables et pas forcément sympathiques, Pearce prend un risque. Le problème est que son personnage principal possède un état d’esprit si particulier qu’en dépit du fait que l’on parvienne quelque peu à en saisir les pensées et affects en début de long-métrage, plus le film avance et plus elle nous semble difficile à appréhender dans ses réactions. C’est pourquoi on a parfois l’impression qu’il y a des défauts d’écriture dans l’évolution des personnages quand d’autres sont oubliés en route (on aurait aimé en effet voir comment réagit la famille dans la seconde partie). Et le final, peut-être un peu trop extrême et dont le sens semble particulièrement compliqué à saisir, est la preuve de ces virages psychologiques pas toujours bien négociés. Dans tous les cas, on a tout de même plaisir à retrouver des protagonistes hors des sentiers battus et une histoire d’amour si perchée.


Si l’intrigue n’est pas à proprement parler stimulante, ce sont les personnages qui la rendent intrigante et captivante. On pense notamment à des seconds rôles intéressants comme la mère castratrice du personnage principal ou cette policière au physique de sorcière, responsable d’une scène tétanisante, mais que l’on ne voit pas assez à l’écran. « Jersey Afair » est une œuvre prometteuse et assez originale pour convaincre. Elle est maîtrisée formellement et nous questionne sur le côté bestial enfoui en chacun de nous. C’est prenant de bout en bout et le film ne souffre d’aucune longueur. Si Michael Pearce ne réalise pas le film de l’année, il nous cueille véritablement avec ce long-métrage troublant situé dans une contrée méconnue et qui ne va jamais dans la direction où on l’attend. Mystérieux et envoûtant.


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JorikVesperhaven
7

Créée

le 19 avr. 2018

Critique lue 531 fois

3 j'aime

Rémy Fiers

Écrit par

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3

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