Le cinéma québécois semble arrimé à la thématique de l’adolescence : 2019 a pu compter, entre autres, Genèse (en prenant en considération la date de sa sortie française) et Charlotte a 17 ans ; voici venir Jeune Juliette qui aborde ce sujet par le prisme d’une réflexion sur la marginalisation en raison du poids. Pourtant, et c’est là sa plus grande force, si le long métrage s’intéresse à un personnage jugé trop gros par son entourage – ou plutôt par la partie la plus idiote de son entourage, composée essentiellement d’adolescents plus âgés –, c’est pour mieux convertir cette dévalorisation injuste en légèreté artistique, tant la mise en scène fait preuve d’inventivité (zooms, transitions fantaisistes, texte rouge apparaissant sur l’image), tant l’écriture du scénario privilégie la tranche de vie au didactisme, tant on ne voit jamais le temps passer.


Jeune Juliette est une œuvre charmante, fort bien interprétée par ses acteurs et surtout par son actrice principale, Alexane Jamieson, sensible mais qui mêle à sa mélancolie profonde une drôlerie irrésistible. En plaçant l’identité dans une zone de turbulences, le film saisit le tiraillement incessant qu’éprouve l’adolescente entre un désir d’appartenir au groupe de référence – tout entier incarné par ce jeune apollon junkie qui chante comme une casserole – et la volonté farouche de suivre sa voie, de ne pas renier ses valeurs. En ce sens, son mouvement est celui d’un ravissement : d’abord le ravissement du cœur, conquis par la beauté factice et facile du beau blond ; ensuite le ravissement du premier rang, pris d’assaut par les deux amies soucieuses d’imposer leur liberté et de s’opposer à l’arbitraire des plus forts.


Animé par une révolte qui va crescendo, le long métrage investit de nombreux thèmes dérivés de l’adolescence – parents séparés qui refont leur vie, rêves de départ vite déçus, amitié, homosexualité – dont le traitement intervient de manière naturelle. Et c’est cette fluidité d’ensemble que nous retiendrons de Jeune Juliette, œuvre pleine de vitalité qui capte de façon très juste le malaise adolescent.

Fêtons_le_cinéma
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le 21 avr. 2020

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