Taxe Tobin

En dépit de la qualité intrinsèque de chaque opus, naviguant entre le très moyen et le franchement naze (hormis l'excellent premier volet, signé James Wan), je garde une certaine tendresse pour la saga "Saw", que j'avais consommé d'une seule traite, un épisode après l'autre comme pour une série TV.
Une sorte de plaisir coupable, médiocre mais réjouissant.

C'est donc avec une certaine satisfaction que j'appris l'existence du projet "Jigsaw", malgré son essence évidemment mercantile, 7 ans après le soi-disant "chapitre final". Passons...
D'autant que les frères Spierig semblent d'une autre envergure que les tâcherons qui se sont succédé à la mise en scène depuis le deuxième opus.

Effectivement, la réalisation de ce "Jigsaw" s'avère plutôt soignée, mais reste tirée vers le bas en raison de tics télévisuels bas de gamme, à l'image de cette musique à la fois moche et envahissante qui vient saloper la séquence du dénouement, de certains comédiens peu charismatiques (le médecin légiste notamment), ou encore d'un montage qui donne parfois l'impression de regarder un épisode des "Experts".

Au niveau du scénario, on sent que les frangins australiens sont quelque peu prisonniers de la saga, qui durant 7 films a développé différents fils narratifs pas évidents à raccorder. Dans ces conditions, le choix du final twist effectué par les Spierig brothers peut se défendre, mais laisse tout de même une impression étrange, en raison de certaines incohérences dans le comportement du Jigsaw, notamment.

Malgré ses défauts, ce nouvel opus reste un divertissement honorable, reprenant la mythologie et les codes de la saga avec un bon équilibre entre les pièges et l'enquête policière. "Jigsaw" ne renie pas ses racines de torture porn (certaines scènes demeurent bien gore, avec des pièges toujours aussi "ludiques") tout en jouant la carte de l'ouverture auprès d'un public plus large.

Le rythme est impeccable, de sorte que l'heure et demie de visionnage s'écoule très vite.
D'autre part, si certains membres du casting déçoivent nettement, on aura apprécié a contrario les prestations du toujours vert Tobin Bell, de la sculpturale Laura Vandervoort et du flegmatique Callum Keith Rennie (qui hérite de la meilleure punchline).

Au final, on aura donc pris plaisir à retrouver une saga horrifique égale à elle-même, avec un volet plus réussi que les précédents, tout en déplorant que les frères Spierig s'en soient tenu au cahier des charges, sans parvenir à élever "Jigsaw" au-delà d'un simple produit de consommation.