Cette œuvre laisse planer quelques doutes & suscite pas mal d'interrogation. Adepte de l'univers de Batman (surtout de la série Warner de 92 dont vient de parler le joueur du fond de la cave) que je regardais petit dans les Minikeums et dont je me suis octroyé l'intégrale dans un coffret collector regorgeant de pépites avec les meilleurs voix (Richard Darbois pour la chauve-souris et Pierre Hatet pour un Joker plus vrai que nature).
Bien que partit prit et formidablement réalisée, la fiction m'a dérouté quant à la vision du personnage et sa concordance des temps.
De base on craint le Joker et c'est un génie du crime, machiavélique, fou allié avec une intelligence remarquable, il est loin d'être bête, méticuleusement organisé, n'hésite pas à porter la gâchette sur ses coéquipiers, tout en exerçant une pression toxique sur Harley Queen... S'intéresser à sa naissance est une brillante idée, on a envie de dire qu'il était temps que quelqu'un s'y dévoue.
Mais ici, tu ne le crains jamais, il est faible, voire fragile. On raconte la genèse, sa création, comment il est devenu le Joker.
Quand bien même, c'est déroutant puisqu'il est aux antipodes de ce qu'il deviendra. Et quand ? Il semble déjà sur la fin de sa vie. Croisant l'enfant Bruce Wayne, quand Bruce aura l'âge de devenir Batman, le Joker aura 90 ans ? Quelle est cette incohérence temporelle ? On se croirait dans un des multiverses de X-men !
Si chaque réal' a son point de vue et son Joker, alors comment construire une quelconque chronologie ou correspondance avec un personnage qui change à chaque film ?
Difficile de s'y retrouver, bien que ça ne change pas la perspective des autres, de son évolution et de sa psychologie profonde.
Cette différence d'âge rendra toute confrontation future avec Batman impossible dans cette temporalité.
Mais très beau film, hyper intéressant, troublant de vérité & de cynisme que ce soit la Société qui "confectionne" le Joker. Joaquin Phoenix qui porte un nom à renaître de ces cendres, possédant lui-même une personnalité atypique est bluffant de générosité, fournissant des efforts très physiques pour la prestation (régime draconien pour devenir aussi maigre). Pour un rôle difficile, on ne peut l'évoquer sans avoir de pensée émue pour Heath Ledger, il réalise une de ses plus belles performances rendant la critique unanime.
Sur fond d'injustices & d'inégalités juxtaposé à un mépris des plus pauvres, glaçant de réalisme. On peut tous devenir un Joker.