J'ai visionné ce film le 10 mars 2016 d'un oeil distrait et suis passé à côté de sa richesse, je pense. Je me le remate donc dès que possible.
Il est beaucoup question de chaussures.


OK DONC.


Etrange film que ce Throw Down, où je retrouve la patte de Johnnie To, mais où le sujet principal, le judo, est traité de manière tellement décalée que j'ai du mal à suivre mon réalisateur chéri sur ce coup-là. Curieux film de judo, en effet, où il faut attendre 55 mn pour voir arriver le premier tatami.


Les scènes de combat sont courtes mais intenses et fort bien filmées, mais le rythme du film, incroyablement syncopé, donne l'impression que l'on s'attarde davantage sur les personnages, losers magnifiques, que sur le judo lui-même. Le film a des ambiances nocturnes, assez jazzy, avec le glamour des néons hongkongais.


Mais le découpage est déroutant, avec des plans pas du tout réalistes, oniriques, qui dépeignent les personnages parfois de manière assez artificielle, presque naïve. Ou bien c'est la musique assez romantique qui donne un aspect un peu guimauve, je ne sais pas. Mais derrière la très belle photographie, j'ai trouvé ici un côté un peu maniéré, je pense notamment aux dernières scènes avec les héros.


Bien sûr, il y a la scène finale dans les roseaux agités dans le vent, hommage appuyé à Kurosawa, mais cela fait un peu prétexte je trouve. En fait je n'avais pas compris pourquoi Kang portait un bandeau à ce moment-là, le film n'est pas assez explicite sur ce point.


Le thème principal, c'est celui d'un alcoolique, accro aux jeux d'argent, dont on espère une bonne partie du film qu'il va arrêter de se détruire en reprenant la pratique du judo. J'ai pas mal penser au personnage de Dean Martin dans Rio Bravo, mais Dionnet, dans l'intro au dvd, fait un parallèle avec Comme un torrent (que je n'ai pas vu). A noter que l'entretien de To dans le bonus dvd ne me convainc pas beaucoup. Il est persuadé que son film vise à redonner de l'espoir aux Hongkongais touchés par la crise en 2003, mais l'atmosphère générale oscille entre l'histrionique et le mélancolique.


Après, il y a toujours ces moments uniques que sait caser Johnny To, comme cette scène, à l'arrière d'un bus, où Sze To embarque avec lui ces deux nouveaux compagnons qu'il ne connaît pas et regarde autour de lui, hagard, car il est encore en train de lutter avec la cuite de la veille.


Ou cette scène d'exposition expédiée de manière jouissive, où l'on suit, entrecoupées, trois discussions où des gens viennent jeter à la figure des trois compères le problème que chacun va devoir résoudre (avec la fille qui répète à chaque fois "Je suis pas une pute", provoquant un silence).


Et enfin ce travelling qui suit Sze To, comme prit de tremblements spasmodiques, qui commence à répéter des gestes de judo, cherchant enfin sa dignité perdue.


Et la scène du ballon rouge (hommage au film d'Albert Lamorisse ?).


Bref, Judo n'est pas un vrai hommage à La légende du grand judo, et se révèle un Johhnie To original, mais assez maniéré. Ce n'est clairement pas mon préféré même si je suis incapable de détester un seul des films de ce réalisateur.


Synopsis
Tony, un marginal qui maîtrise le judo, terrasse le garde du corps de Sze To, patron alcoolique d'une boîte de nuit. Il veut défier le patron. Pendant ce temps, Mona, une marginale, est recrutée pour chanter le soir. Sze To les emmène dans une salle d'arcade, où ils font équipe pour subtiliser la mallette bourrée d'argent d'un caïd,Dama. Alors qu'ils partagent l'argent, Tonny colle une dégelée au judo à Sze To, qui constate son délabrement physique. Ce dernier perd tout son argent aussitôt au jeu. Dama, le caïd lésé et divers créanciers retrouvent nos trois compères pour leur réclamer beaucoup d'argent, ce qui se termine en baston. Un maître du judo habillé en costard, Kang, intervient pour les aider.


Alors que tout semble partir à vau-l'eau dans les vies de chacun, Tonny organise un tournoi de judo. Cela amène beaucoup à se reprendre en main, mais pas Sze To, qui a encore des problèmes d'addiction au jeu : comme Mona vole l'argent qu'il a volé, il la protège et se fait tabasser. Tony avoue qu'il est obsédé par le combat car il deviendra bientôt aveugle ; l'épaule luxé, il s'entraîne à se battre à une seule main. Sze To arrive trop tard à l'hôpital, où son ancien maître de judo meurt.


Un soir, Tony revient au club. Il dit que l'histoire du glaucome est inventée pour encourager les gens à se battre contre lui. Bizarrement, Sze To sort de sa torpeur et se bat contre Tony, offrant cette fois un défi intéressant. Il retourne voir le dojo de son maître, s'occupe de son fils demeuré. Il se mesure au judo à tous ses créanciers, gagnant au moins leur respect. Nos trois amis font une pyramide humaine pour aider Mona à attraper un ballon rouge.


En réalité, c'est Sze To qui a une maladie qui lui fait perdre la vue. Devenu infirme, il défie Kang. Le combat a lieu dans un champ de bambous, de nuit.

zardoz6704
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le 10 mars 2016

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