Il n'a pas la puissance émotionnelle de Mommy ce film et souffre de quelques longueurs mais le regard de Dolan et le talent de ses interprètes en font un bon film.
Les moments d'ennui alternent avec les moments de grâce comme les 5 premières minutes du film ou la plupart des scènes avec Nathalie Baye, exceptionnelle dans le rôle d'une femme qui ne lui ressemble pas du tout.
Gaspard Ulliel est également très bon, très grave ; Léa Seydoux est convaincante dans le rôle de la fille perdue, Vincent Cassel, crédible en mec énervant, brutal, torturé.
Reste Marion Cotillard, je ne sais pas si elle joue mal mais son personnage est agaçant, parfois au plus haut point, avec son effacement, ses hésitations, ses trémolos dans la voix. Les affrontements avec Cassel sont parfois pénibles à regarder.
La musique est bonne et la caméra sait se poser là où il faut. Dolan est un naturaliste du cinéma, montrant la vie au plus près, les expressions des visages comme si on pouvait les toucher, les moments anodins comme ceux importants. Dans ce film écrit, réalisé et avec des costumes conçus par lui-même, il s'affirme comme un grand cinéaste. Sauf qu'ils y a quelques incohérences, sur les cartes postales, on voit qu'il est écrit "Faches-Thumesnil" (ville de la banlieue lilloise) comme destination de ces cartes sauf que ce qu'on voit du paysage n'a rien à voir avec Faches-Thumesnil et je sais j'y suis allé. Les routes avec une ligne jaune centrale rappellent même l'Amérique du Nord donc voilà je trouve ça idiot d'avoir tourné au Canada un film censé se dérouler en France, d'autant plus que les acteurs sont français et l'auteur de la pièce dont est tiré ce film est français.
Cette pièce, écrite il y a plus de 20 ans, a quelque chose d'autobiographique (l'auteur, Jean-Luc Lagarce a vécu à Berlin donc loin de sa famille et était homosexuel) qui pousse à croire que la mort imminente du personnage joué par Gaspard Ulliel est qu'il est malade du Sida (Lagarce en est mort) mais là aussi on reste sur notre fin, car Louis ne dit rien, on pourrait croire qu'il va se suicider tant il porte la joie de vivre sur lui mais non, enfin ça paraît un détail au vu de la visée du film (et de la pièce) : montrer la difficulté à dire les choses. Les choses de la vie.