Même avec ses imperfections, ce film est intéressant pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, son thème, le désenchantement des anciens militants qui regrettent la flamme de leur jeunesse, la défaite de leur cause, est peu abordé dans le Roman Porno. La férocité avec lequel Yamaguchi décrit les gauchistes des années 70, verbeux, prompts à accuser l’autre de trahison, méprisants et violents est probablement en lien avec les purges internes au sein de l’Armée Rouge Unifiée qui ont traumatisé les Japonais en 1972. Le constat est sévère et sans appel. Que reste t’il à vivre pour ces ex-jeunes défaits ? L’engagement politique est-il un leurre vis à vis de l’engagement amoureux ?
La seconde raison est Mari Tanaka qui avec ses faux airs de Christina Lindberg, irradie les personnages et le film. Avec un naturel confiant, elle incarne une liberté clairvoyante alliée à la fragilité humaine. Dès lors, les autres personnages féminins, Ariko (Aya Ichida) l’épouse, Misa (Ai Ihara) la nièce et Chiiko, (Kozue Yoshida) l’autre militante ont bien du mal à exister. Par ailleurs, aucune de ces dernières ne referra un autre film.
Enfin, la réalisation de Seiichiro Yamaguchi également scénariste, était adaptée au propos, jouant sans en abuser des codes du film intellectuel de gauche (passage noir et blanc, décalage voix-image, arrêt sur image). Il a aussi une maîtrise remarquable notamment des plans fixes. Il est fort regrettable que sa carrière au sein de la Nikkatsu ait été aussi courte.
Après, il y a bien sûr quelques imperfections inévitables dues à la logorrhée stéréotypée des gauchistes qui peuvent énerver le spectateur.
A la trilogie classique du questionnement du Roman Porno (amour, sexe et rapport homme-femme), ce film rajoute une quatrième dimension : l’engagement politique. Pour toutes ses raisons, ce « Love Hunter » mérite le détour des cinéphiles.