{ 1975. FR : L'Accusé / La Ville Accuse. ITA : La Polizia Accusa : Il Servizio Segreto Uccide (qu'on pourrait traduire par La Police Accuse, Les Services Secrets Tuent... ou bien La Police Accuse Les Services Secrets De Tuer). ENG : Silent Action.
Vu en VOST, repack trouvé je ne sais plus où sur le net...}

Les années 1970 à Rome, pleine période des « Années de Plomb ». Une « épidémie » de suicides plutôt louches semble toucher des hauts-dignitaires de l'armée. La presse commence à se questionner...Pendant ce temps, le commissaire Solmi (Luc Merenda), de la section criminelle, mène tranquillement une enquête sur un quidam assassiné après une partie fine. Ils se rendent compte que la victime utilisait ses connaissances en électronique pour enregistrer et faire chanter différentes personnalités. Une bande sonore concernant le Général Stocchi, un des militaires « suicidés », semble mettre au jour un vaste complot concernant un coup d’État. Étrangement, le juge Mannino (Mel Ferrer) et ses supérieurs veulent classer l'affaire rapidement et la bande compromettante disparaît. Solmi, seul contre tous, semble quand-même pouvoir compter sur une amie journaliste (Delia Boccardo) et un obscur représentant des services secrets (Tomas Milian https://www.senscritique.com/liste/Mes_acteurs_fetiches_Vol_1_Tomas_Milian/2861774) pour éclaircir une affaire qui les dépasse...
Le genre du film d'enquête, polar politique et engagé, était dans les années 1970's à son firmament. En effet, les œuvres de qualité fleurissent alors : A Cause D'Un Assassinat de Pakula, L'Attentat de Boisset, Z et plus généralement les films de Costa-Gavras, I...Comme Icare de Verneuil et plein d'autres.
Du côté transalpin, entre les attentats, (tantôt d'extrême-droite, tantôt d'extrême-gauche), les tentatives de coup d’État (Borghese en 1970 notamment), le Réseau Gladio ou encore la Loge P2, l'inspiration ne manque pas ! L'Affaire Mattei ou Cadavres Exquis de Rosi, Enquête Sur Un Citoyen Au-Dessus De Tout Soupçon de Petri, notamment. Ainsi qu'une bonne partie de la carrière de Damiano Damiani.
Une période bénie où le cinéma avait les couilles de traiter de sujets d'actualité, et ce de façon contemporaine. On pourra évidemment taxer ces films de gauchisme ou de manichéisme, mais la démarche est exemplaire...
Même le cinéma de genre s'y mettra, prouvant ainsi que les thèses conspirationnistes étaient alors partagées par des pans entier de la population. Le réalisateur de La Polizia Accusa..., Sergio Martino et son producteur de frère Luciano, ne sont ainsi pas de dangereux militants des Brigades Rouges !On pourrait plutôt dire de Sergio qu'il fût un grand artisan du bis italien assez crossover, lorgnant vers les genres en vogue : western, SF, horreur, cannibales, giallo (où il excella), comédie érotique et enfin le polar, avec La Polizia Accusa...**donc, et **Rue De La Violence en 1973, sur un sujet finalement assez similaire et avec déjà Luc Merenda en redresseur de torts.
Malgré un manque de budget criant (la scène d'attaque du camp fasciste est navrante), le film déroule son intrigue avec une certaine force, sans grande originalité certes. Les séquences d'ouverture et de clôture du métrage sont ainsi particulièrement réussies ; plus généralement l’œuvre dégage un sentiment de pessimisme amer et de paranoïa. On pourra lui reprocher un peu trop d'austérité, contrebalancée timidement par un penchant ironique et quelques scènes d'action bien menées, que la musique de Michelini souligne à merveille.
Le problème de La Polizia Accusa...est qu'il souffre fortement de la comparaison avec les films sus-cités et qu'il ne leur arrive guère à la cheville. De par sa distribution commune (**Claudio Gora https://www.senscritique.com/liste/Mes_acteurs_fetiches_Vol_12_Claudio_Gora/2874296, Michele Gammino, Arturo Dominici) et son sujet, difficile de ne pas songer à Confessions D'Un Commissaire De Police... et là, le bât blesse. Martino n'est pas Damiani, et la discussion philosophico-politico-morale finale entre Milian et Merenda, tellement affligeante, finit de nous le rappeler... Le film doit donc être pris pour ce qu'il est, un polar couillu, efficace mais fauché.
Dommage, car le film n'est pas dénué de qualité, notamment grâce une jolie distribution. Comme dans Rue De La Violence, le p'tit français de l'étape Luc Merenda endosse de nouveau le rôle du commissaire antipathique, solitaire, martyr. Rôle ingrat bien interprété. Les deux stars du film, Mel Ferrer et Tomas Milian, sont finalement assez rares dans le film. Le cubain prouve une nouvelle fois sa versatilité avec une tronche improbable, et joue bien son rôle de renard roublard. Mel Ferrer, en pleine période italienne (pas la meilleure partie de sa carrière...), est ici parfait en juge flegmatique, quasi-muet et sans expression. Tellement « neutre » dans son interprétation, qu'on arrive guère à saisir les intentions de ce serpent !
Les seconds couteaux sont de qualité avec le grand Claudio Gora (Une vie Difficile, Le Fanfaron...ou encore 5 Hommes Armés ou Un flic Hors-La-Loi) qui cabotine à souhait en riche industriel complotiste. C'est un plaisir aussi de retrouver la bonne bouille de Michele Gammino (aperçu dans L'Emmerdeur entre autres) en lieutenant de Merenda. Son duo avec Gianfranco Barra, qui a surtout œuvré dans la comédie populaire, donne d'ailleurs quelques rares moments de rire. Antonio Casale, spécialiste des westerns, est redoutable en nettoyeur de service, affublé de Carlo Gaddi, autre figure du spagh'. Si on ajoute à cela les présences de Loredana Nusciak (Django), Carlo Alighiero (Torso, Le Chat A Neuf Queues) ou de la venimeuse Paola Tedesco, connue en Italie pour ses qualités de chanteuse et sa plastique irréprochable, on peut dire que le casting fait partie des points forts du film.
Enfin, le méconnu Luciano Michelini signe ici une musique de qualité, à la fois classique, jazzy et volontiers ironique : https://www.youtube.com/playlist?list=OLAK5uy_mz8DBvU5Wtm3WMqBk6NeMOnScwWIdq3To

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le 13 nov. 2020

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