La naïveté initiale de The Education of Little Tree ne dure qu’un temps, miel à même d’agglutiner un public familial qui chercherait peut-être à se tenir écarté des tourments de l’âme humaine. Car rapidement le jeune veau vient à mourir, déjà chétif au moment de la transaction (50 cents) ; on met un terme à ses souffrances, on nourrira les chiens de sa chair et transformera sa peau en mocassins pour la petite fille qui n’en a pas. Après le veau, la blessure mortelle du grand-père, puis l’avis de scolarisation forcée au sein d’un établissement encadré par l’État. Cette montée en gravité s’effectue en trompe-l’œil, dans un calme ambiant que porte la partition musicale de Mark Isham, d’une imperturbable allégresse ; elle équivaut à la seule progression dramatique du récit qui, sans trame narrative fournie, n’est constitué que d’une suite d’apprentissages au contact des événements ponctuant l’existence d’une famille recomposée, de peuples et de cultures métissés, d’un jeune garçon enfin qui doit trouver sa place et construire son identité.

La relation permanente entre l’immense et l’infime, entre l’étoile du chien et la petite bille bleue qui agit comme un filtre quand on regarde à travers elle, entre le monde de l’esprit et celui du corps, respecte en la simplifiant la spiritualité amérindienne : sa marginalité, contrainte et acceptée désormais comme une donnée inhérente à l’identité indienne, se cultive par un grand-père écossais qui distille du whisky en cachette et le vend dans le village voisin, par Little Tree lui-même qui noue une relation interdite avec une fille issue d’un milieu rempli de préjugés racistes puis qui se lie d’amitié avec celui dont personne ne veut, dans son monde comme lui l’est aussi. La mise en scène est volontairement épurée, sans effets aucuns, captant bien les paysages de montagne, les levers du soleil et le mouvement des hommes dans les chemins, les broussailles, les étendues vertes ouvrant sur l’infini. Ainsi dépouillé, The Education of Little Tree atteint une certaine beauté, et une puissance certaine : l’émotion nous prend à la gorge. Une réussite.

Créée

le 1 nov. 2023

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