Vidoc démystifié

Pour qui à découvert la légende de Vidocq dans le film magique de Pitof - le premier film français a avoir été tourné presque entièrement en numérique - puis qui renforcé son intérêt pour le personnage en lisant sa biographie romancée par Jean Savant, ne pouvait qu'attendre beaucoup de L'Empereur de Paris, tant le titre du film laissait présager un panégyrique cinématographique à la hauteur de cette figure incroyable, pourtant méconnu du grand public.

Et bien, le spectateur dans cette situation pourra en rester sur sa faim. En effet, le but de Jean-François Richet semble bien au contraire d'avoir voulu démystifier Vidocq, de réduire ce personnage à la force, l'audace et l'intelligence surhumaine, à l'incarnation d'un homme beaucoup plus accessible, en proie aux sentiments les plus humains.

Le problème, c'est que le film s'en ressent, car on dirait qu'on lui a appliqué la même potion, la même cure d'amaigrissement. L'intrigue est très très attendue et prévisible. La galerie de personnage est assez fournie et impressionnante, mais pour la plupart leur mise en rapport très brève ou avec une intensité minime avec le destin de Vidocq fait qu'on ne comprend que peu leurs intentions et leurs actions à l'écran. Même Vidocq lui-même, la plupart du temps bien interprété par Vincent Cassel, se retrouve parfois à exprimer d'une voix caverneuse et plate des phrases peu enrichissantes pour le récit. Les dialogues d'une manière générale font preuve de peu d'originalité.

Heureusement, ce film reste plaisant à regarder grâce à son esthétique : une belle réalisation avec un cadrage classique mais efficace la plupart du temps, et des plans et des mouvements de caméras parfois empreints de fantaisie. Des décors et des costumes qui vous plongent dans l'atmosphère de l'époque. Des scènes de combat plutôt réussies, mais qui paraissent néanmoins un peu fades voire poussives par rapport à celles du Vidocq de Pitof, plus virevoltantes, avec parfois des raccords qui semblent avoir été motivés par l’impossibilité de tourner en plan-séquence les scènes en question - par incapacité des acteurs à effectuer la chorégraphie d'une seule traite ? Enfin, l'attrait principal du film reste dans l'époque dans laquelle il s'inscrit : l'Empire napoléonien, encore tout empreint de la Révolution française, où se croise gueux, nobles, bonapartistes. Celle-ci est plutôt bien restituée et expliquée et cela peut même amener à quelques frissons, comme lors de la scène finale de face-à-face entre Vidocq et Fouché, ministre de l'intérieur de l'époque, et que ce dernier dit au héros "Il va vous falloir... choisir Vidocq : servir votre pays, ou bien rester dans l'ombre et la médiocrité." Big up à Fabrice Lucchini en Fouché qui ici comme dans les autres films où il fait des apparitions, fait toujours une forte impression.