Un botaniste en itinérance au cœur de la province de Echizen retrouve la trace d’un collègue folkloriste disparu dans un village situé à proximité d’un étang surnommé l’« Étang du démon ». Depuis trois ans, cet ancien professeur doit faire sonner la cloche du temple trois fois par jour, sans quoi les eaux de l’étang, habité par l’esprit d’un dragon, inonde la région.

Sorti en 1979, L’ÉTANG DU DÉMON est une œuvre riche et envoûtante. D’un côté, ce village épuisé par une interminable sécheresse ancre le récit dans un quotidien tout à fait réaliste. De l’autre, la mise en scène des esprits peuplant la région, dans la tradition du kabuki, un genre du théâtre japonais, apporte au film une dimension opératique et folklorique étrange et inattendue. Le mélange de ces deux imageries crée une ambiance unique. Jamais les deux heures de métrage se font ressentir. On est embarqué, par le montage, par la narration, dans ces rituels qui rythme cette vie de petit village de montage en proie à la superstition.

Le film de Masahiro Shinoda est extrêmement profond. Une profondeur que révèle le critique Stéphane du Mesnildot dans les bonus du bluray édité par Carlotta. A la lumière de son commentaire, la trajectoire de ce personnage d'ancien folkloriste qui, par le rôle qu'il joue désormais au sein de cette communauté paysanne, devient un acteur d'un folklore, est fascinant.

Enfin, on y apprend que les personnages de Yuri et de la princesse Shirayuki sont interprétés par un seul et même acteur, Bando Tamasaburo, un onnagata extrêmement célèbre au Japon. Dans le milieu du théâtre, un onnagata est un acteur homme jouant un rôle féminin. A l’origine, les compagnies de kabuki étaient mixtes. Mais au XVII siècle, les dérives de prostitution signalées au sein des troupes conduisirent le shogun à interdire les femmes de monter sur scène. Certains acteurs mâles décidèrent alors de jouer des personnages du sexe opposé.
Dans L‘ÉTANG DU DÉMON, grâce au talent de Bando Tamasaburo, l’illusion est totale, et participe au charme étrange du film.
Bref, le réalisateur Masahiro Shinoda nous convie, nous, spectateur français, à un beau et étonnant voyage cinématographique.

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le 22 févr. 2022

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