Une famille apparemment heureuse voit son quotidien perturbé par l'arrivée du fils adolescent d'un premier mariage.

Le thème de l'élément perturbateur qui sème la discorde là où semble régner l'harmonie est propice à des moments forts de cinéma où peuvent apparaitre les sentiments les plus intenses : trahison, vengeance destructrice ou désir irraisonné, passion fulgurante qui envoie tout balader.

Il peut s'agir d'un élément perturbateur venu, dans un désir de vengeance, détruire le bonheur d'une famille unie et heureuse (la main sur le berceau, de Curtis Hanson; la tourneuse de page, de Denis Dercourt) ou d'un élément perturbateur révélateur d'insatisfactions cachées, de failles enfouies, d'un sentiment de manque, d'inaccomplissement, de besoins ou de désirs non assouvis, parfois inconscients (Sur la route de Madison, de Clint Eastwood; les témoins d'André Téchiné).

Je ne dirai pas dans laquelle de ces catégories se place ce film là.

Anne, avocate, épouse et mère, brillamment interprétée par Léa Drucker, est la pierre angulaire de ce drame familial autour de laquelle tout converge et tout dépend, confrontée à la présence, pas forcément désirée, du fils "à problèmes" de son mari.

Difficile de parler de ce film, dont la thématique ne peut que susciter des émotions et des interrogations (voir des polémiques), sans spoiler. Donc, attention, à partir d'ici : SPOIL SPOIL SPOIL !

Ses tentatives pour le séduire (sans arrière pensée), afin qu'il s'intègre à la famille, finiront par se retourner contre elle, et contre lui.

La force majeure de ce personnage tient tout entier dans ses paradoxes.

Lors d'une scène assez tendre avec son époux, elle confie avec sincérité aimer les peaux vieilles, celles qui ont vécues et qui la touchent. Elle prouve par la suite ne pas être insensible aux peaux (beaucoup) plus jeunes. L'apologie de la séduction de la vieillesse cède rapidement le pas devant le trouble que provoque la grâce de la jeunesse, sa candeur et ses fragilités.

Avocate spécialisée dans la protection de la jeunesse, elle fera finalement passer sa propre protection devant celle de l'adolescent.

La scène la plus frappante est sans doute celle où, pour se défendre, elle influence et manipule son mari tout en lui reprochant d'être influençable et manipulé par son fils. Et lorsqu'elle accuse son beau-fils d'être un monstre, la froideur implacable avec laquelle elle accuse la rend presque monstrueuse.

Le film ne la condamne pas pour autant, évitant d'être dans le jugement, ni pour le garçon dont l'aveu risque de tout détruire, ni pour la femme dont les mensonges peuvent précipiter la chute d'un adolescent, finalement plus fragile qu'il ne le laissait paraitre de prime abord.

La fin, assez brusque, est un peu frustrante. Le film s'achève sur une histoire non finie, qui ne peut pas être terminée. A nous d'en imaginer la suite, dont il ne peut sans doute rien résulter de bon.

Floridjan
7
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le 14 sept. 2023

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2 j'aime

Floridjan

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