Si l’interprétation de Léa Drucker, aussi ambiguë qu’impressionnante d’autorité, mérite d’être saluée, il ne faudrait pas oublier la part de la mise en scène dans ce qui fait la réussite de ce film. La comédienne, qui campe ici un personnage de Phèdre moderne, a été particulièrement bien dirigée : la longueur de ses silences, laissant planer l’incertitude sur ses réactions ; la façon dont elle est installée à l’intérieur du cadre, souvent bien au centre dans une position de puissance ; ou au contraire lorsqu’elle n’y ait présente que partiellement, voire pas du tout, ce qui ne met que plus en valeur l’autorité de sa voix, la force de son argumentaire (elle est avocate, ça aide), les mots venant littéralement percuter les visages interdits des autres personnages, le beau-fils mais aussi le mari, filmés eux en gros plan. Tout cela est à mettre au crédit de Catherine Breillat, qui a su parfaitement jouer de la présence souveraine de son actrice pour distiller le trouble sur un sujet quand même assez risqué.
Là aussi, sur la question du sujet traité - une relation incestueuse - tout est subtilement amené, sans effet de surdramatisation, comme par exemple dans la scène du premier baiser qui arrive tout à fait simplement. La passion entre le fils du mari et la belle-mère n’en est que plus crédible. Enfin, dernier point qui mérite d’être salué : le final, particulièrement réussi.
Un fondu au noir absolument sublime sur lequel vient s’ajouter le non moins sublime « Vingt ans » de Léo Ferré, artiste sulfureux lui aussi et choix musical très judicieux de la part de la réalisatrice. Une musique, une image et un dernier éclat discret (mais pas innocent) de nature à imprimer durablement la rétine et l’esprit, venant clore un film qui aura réussi son pari : provoquer le trouble.