Un soleil de plomb
C'est un truisme que d'affirmer qu'adapter Camus est plus difficile que de puiser dans Simenon, au hasard. C'est qu'il n'est pas question de trahir l'esprit de l'auteur de L'Étranger, tout en...
le 17 oct. 2025
27 j'aime
4
Je suis sortie de cette séance avec un mélange de fascination et de trouble.
Un film intéressant que j’ai apprécié sur de nombreux points. Ce qui m’a touchée c’est cette esthétique marquée par le noir et blanc avec tout de même cette touche de modernité.
Dès le début du film et jusqu’à la fin, François Ozon réussit à créer une atmosphère épurée, parfois froide qui correspond bien au ton du roman de Camus. Des silences, une lenteur recherchée, des regards, une tension visible qui est très bien transposée dans la mise en scène.
Certains vont ressentir cette lenteur contemplative comme ennuyeuse avec une absence de rythme mais justement ces longueurs apportent aussi des contrastes plus subtils. Ce noir et blanc visuellement très beau présente de véritables tableaux. Cependant la chaleur, la lumière écrasante du soleil d’Algérie ( éléments majeurs du roman ) sont plus difficilement transposables et peuvent atténuer cet effets sensoriel.
Dans le roman les mots de Camus apportent des éléments significatifs sur la personnalité de Meursault dans sa psychologie, ses névroses, son introspection. À l’écran ce vide émotionnel est plus complexe à traduire.
Le défi d’Ozon: rechercher à l’image ce vide intérieur : un défi de taille !
On ressent parfois un certain malaise mais Ozon réussit à faire respirer le film.
Il fait également réfléchir sur la justice, les normes sociales établies dans un contexte colonial, le rapport à la culpabilité et l’impact de l’absurde.
Petit bémol, le temps accordé au procès est un peu long et parfois on reste en surface.
Ce film est pour moi une adaptation ambitieuse avec des plans visuels magnifiques : la ville d’Alger, la plage, la mer, les baignades, les attitudes, les démarches, et regards. La séduction est très travaillée. Une élégance, une recherche profonde de l’intime, fidèle dans l’esprit de Camus mais la tension brute, le texte écorché de l’auteur n’est pas atteint. Pour ceux qui savent prendre une distance, qui aiment le cinéma « contemplatif » ce sera un magnifique moment. Un film plus difficilement accessible à ceux qui recherchent des vibrations émotionnelles fortes.
Les acteurs sont très bons, Benjamin Voisin, Rebecca Marder, Pierre Lottin. Il faut saluer leur talent et travail. Beaucoup d’épaisseur, aucune fioriture, une économie de mots qui donne de la force et de la sensibilité dans l’interprétation des personnages. Un jeu intelligent et touchant, tout en finesse entre ombre et lumière.
Voilà une petite analyse et mes ressentis.
Je vous le conseille vivement, ce film ne laisse pas indifférent et c’est ce que j’aime dans le cinéma.
Créée
le 3 nov. 2025
Critique lue 51 fois
4 j'aime
C'est un truisme que d'affirmer qu'adapter Camus est plus difficile que de puiser dans Simenon, au hasard. C'est qu'il n'est pas question de trahir l'esprit de l'auteur de L'Étranger, tout en...
le 17 oct. 2025
27 j'aime
4
La mer s’ouvre comme un silence ancien, et sur ce silence s’installe un regard qui n’explique rien mais qui sait tout. La lumière se fend, lente et tranchante, creuse la peau des visages et laisse...
Par
le 29 oct. 2025
25 j'aime
1
Il est de chaque plan, tout gravite autour de lui, et pourtant à l'inverse du soleil, c'est un centre vide. Comme un trou noir qui absorbe la lumière, insondable et mystérieux, il semble être hors du...
Par
le 20 oct. 2025
23 j'aime
10
Brass Target - en français, la Cible étoilée est un film qui mélange les genres et les citations. C'est d'abord un film de guerre - avec une exposition plus vraie que nature des relations viriles...
Par
le 31 oct. 2023
3 j'aime
C'est un roman sensible, réaliste et drôle qui place un homme, un professeur de philosophie d’une maturité certaine dans un monde qu’il espère ouvert pour contenir plus que l’avenir et la...
Par
le 27 sept. 2023
3 j'aime
L'écrivain G. K. Chesterton est réputé pour sa forte personnalité. Quelle est-elle ? On dit qu'il est chrétien, par opposition aux matérialistes et aux mécaniciens. Le dualisme grec. Et si Chersteton...
Par
le 18 avr. 2025
2 j'aime