Ce film a souffert à sa sortie d'une trop rapide comparaison puisqu'on accusait Clint de plagier les westerns léoniens. Certes, on peut y déceler quelques éléments communs comme une certaine technique d'appareils et de cadrages, et de la violence crue, de même que le personnage de cavalier errant sans nom, qui parle peu et tire vite s'apparente à ceux que Clint incarnait chez Leone. Mais en fait, Clint va plus loin car il réalise l'un des premiers westerns "fantastiques" ; cette ambiance est créée par un ton irréel, un peu irrationnel et envoûtant. Les habitants de Lago évoluent dans une sorte de cauchemar vécu, ils accueillent un étranger justicier qu'ils croient pouvoir les protéger, mais très vite l'étranger bafoue les traditions en nommant sheriff un nain souffre-douleur, en couchant avec la femme de l'hôtelier et en faisant repeindre la ville en rouge qu'il rebaptise "Hell". Sa violence impitoyable inquiète ces habitants, il se place en véritable ange exterminateur en dénonçant l'hypocrisie, la lâcheté et le conformisme d'une petite ville collectivement coupable. Le fantastique formel qui transparait ici est plus explicite dans la VO que dans la VF qui a cru en 1973 que le public ne serait pas capable d'y déceler ce message subtil, il vaut donc mieux voir le film en VOST, où le personnage de Clint apparait comme étant le fantôme d'un mort revenu se venger, ou tout au moins son double. C'est ce qui fait de ce film un western étrange, au ton fascinant, surprenant et aux accents baroques.