L'Île d'I-Eoh
6.4
L'Île d'I-Eoh

Film de Kim Ki-Young (1977)

L’île d’I-Eoh est un film coréén réalisé en 1977 par Kim Ki-young adapté d’un roman de Yi Cheong-jun. C’est une rencontre prometteuse entre le réalisateur de La servante et un des écrivains coréens proéminents du vingtième siècle, dont les textes ont notamment étaient adaptés par Im Kwon-taek avec La chanteuse de Pansori et Lee Chang-dong avec Secret Sunshine.


Le film est souvent comparé à The Wicker Man, réalisé en 1973, avec lequel il partage certains thèmes et un genre, le folk horror. Comme dans le film britannique, le scénario est centré autour d’un homme se rendant sur une île isolée pour enquêter sur une disparition. Mais, là ou Robin Hardy explore la possibilité d’une société alternative, Kim Ki-young semble plus se pencher sur les relations femmes/hommes et les rôles sociaux genrés.


Construit en flash-back successifs, le film nous fait découvrir de manière morcelée la vie de Cheon Nam-seok né sur une île où les hommes n’ont pas le droit d'habiter et qu’il quitte à la mort de son père par peur d’une malédiction pesant sur sa famille. L’intrigue est difficilement compréhensible au-delà de cette trame, le réalisateur ne semble pas particulièrement intéressé par la mise en place d’une narration consistante et compréhensible mais bien plus par la mise en scène d’une certaine ambiance et de tabous sexuels. Que le désintérêt pour le scénario soit réel où qu'il soit une conséquence des pressions de la dictature de Park Chung-hee et des coupes budgétaires qui en découlent, cela reste une faiblesse du film. Mais elle est partiellement compensée par l'ambiance plus fantastique que vraiment horrifique mêlant deux mythes: celui de l’île d’I-Eoh, île paradisiaque promise aux marins morts en mer, et celui de l’île peuplée uniquement de femmes. Les beaux plans filmés en extérieur donnent vie à ces mythes et sont parmi les grandes réussites du film.


Le dynamisme de l'œuvre vient de la rencontre de ce monde fantastique et des considérations sociales réalistes. Beaucoup de sujets sont évoqués, la pollution, le capitalisme, le tourisme de masse, mais celui qui est vraiment traité est la relation femme/homme. Cela résulte en un portrait peu reluisant de la société coréenne qui semble peuplée d’hommes veules entretenus par des femmes obsédées par le désir d’avoir des enfants. Kim Ki-young a le courage d’aller au bout de son propos dans une scène finale baroque et hallucinante.


L’île d’I-Eoh est un film difficile à regarder d’une part parce qu’il est difficile à suivre et d’autre part pour les partis pris extrêmes du réalisateur. Mais on est récompensé par de beaux plans tournés en extérieurs et un final choquant et mémorable.


ailuridae
6
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le 19 oct. 2025

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