Dès le début on nous prévient que l’on va nous raconter une incroyable histoire. Et on n’est pas déçu.
Pi (je ne dévoilerais pas ici l’origine de ce nom étrange), est un être particulier. Fils d’un père athée ayant rejeté la religion, et d’une mère plus croyante, il grandit en Inde, ou cohabite à la fois l’hindouisme et ses millions de Dieux, le christianisme et l’islam avec un Dieu unique. Pour trouver sa propre voie, son propre chemin spirituel, il s’est intéressé à chacune d’elles. Mais c’est bien plus tard qu’il trouvera ce qu’il cherche… Dans un voyage qui l’emmènera au bout de lui-même, à travers les forces de la nature, à la fois belle et dangereuse, ou la grandeur de l’univers se reflète dans la beauté de la nature et ses formes variées. Des images magnifiques de couchers de soleil aux méduses luminescentes éclairant l’océan d’une lumière irréelle. Et des images poignantes aussi, comme celle du bateau coulant sous l’eau emportant sa famille, lumières encore éclairés destinées à s’éteindre, construction humaine fragile face aux éléments.
Mais cette fois, contrairement à "the hobbit", je trouve que la 3D n'amplifie pas vraiment la beauté des images.
Un voyage émouvant mais aussi onirique et poétique, où la réalité s’estompe et laisse place à l’imaginaire, comme dans cette scène où le regard de Pi se perd dans les profondeurs, où les animaux marins se transforment au gré de son imagination. Plus le récit avance et plus ses aventures paraissent irréelles. Ce qui revêtira une toute autre signification à la fin…
Un voyage qui l’emmènera à rencontrer « Dieu ». Car « L’odyssée de Pi » propose également une réflexion intéressante sur la foi. Comme il est dit dans le film, si la science décrit l’univers, elle ne dit rien sur ce qui se passe à l’intérieur de nous, dans nos cœurs. Il s’agit donc d’avantage de foi, de spiritualité que de religions. Il s’agit aussi de tolérance.
Et que dire de sa relation avec le tigre sauvage, aux émotions superbement dépeintes. Et quelle relation ! Il ne s’agit pas d’amitié ni d’apprivoisement, les deux êtres vont parvenir à créer une entente mutuelle et survivre ensemble, côte à côte, malgré le fossé qui les sépare et les difficultés de leur situation. Une situation qui mettra du temps à se mettre en place, non sans difficultés et pas mal d’humours.
Il y a peut-être quelques longueurs, car durant l’essentiel du film Pi est à la dérive sur un radeau, et la présentation des personnages au début peut paraître longue, mais moi ça ne m’a pas gêné. Mais c’est sur il faut pouvoir apprécier ce genre de film sans vraiment d’action, pour la beauté des images et la profondeur du récit.
Magnifique, émouvant, poétique, intéressant, réussit tant sur le fond que sur la forme, ce fil m’a ému comme rarement.
SPOLIERS
La fin surprenante du film apporte encore un intérêt supplémentaire, car le voyage raconté est en fait toute une métaphore. Je n’ai pas lu le livre donc c’est mon interprétation à moi, mais on peut voir l’île flottante comme une représentation de la vie : elle peut donner et reprendre. C’est aussi un refuge, mais on ne peut pas y rester éternellement, tôt ou tard il faut retourner dans le monde, aussi moche soit-il, sous peine de dépérir.
Et la foi est justement ce qui permet de résister à laideur du monde, et à l’adversité. C’est le cycle de la vie, il faut tuer pour survivre. Cette nécessité fait naître en nous une énergie intérieure (symbolisée par le tigre). Mais si elle est nécessaire pour survivre, cette énergie peut se transformer en violence, présente même chez une personne bienveillante comme Pi, et capable de surgir en situation extrême.
La fin du film apporte une réponse intéressante. « Aucune des deux histoires ne permet de savoir pourquoi le bateau a coulé, mais quelle est celle que vous préférez ? ». Voilà comment je vois les choses : ni les croyances ni le rationalisme ne permettent de savoir pourquoi le monde est ainsi fait, mais il est plus réconfortant d’avoir la foi.
