Une bonne dizaine d'années après "le silencieux", Claude Pinoteau retrouve Lino Ventura pour un nouveau polar. Sauf qu'ici le thème n'est pas l'espionnage mais plutôt une machination.

En fait le film est pour tous publics et le scénario rassemble diverses thématiques toutes plus ou moins centrées sur le personnage joué par Lino Ventura. Ainsi, on trouvera des thématiques très familiales (l'enfant adopté, la mère italienne bougonne, la maîtresse prise entre deux hommes, …) ou relatives à l'amitié (le clown ventriloque et sa femme) avec, en fond, bien entendu, ces menaces de plus en plus précises qui sont le sujet principal de l'intrigue.

Il est évident que cette dispersion des thèmes utilisés dans le scénario affaiblit l'aspect thriller ou noir qui ne reprend tous ses droits que dans la dernière demi-heure dans une fin très enlevée. Mais ! Il y a un Mais …

Sachant qu'il s'agit du dernier film dans lequel Lino Ventura joue un rôle important, rétrospectivement, il est émouvant de voir que ce film, reprend les différentes facettes des types de personnages qu'a pu incarner Lino Ventura : l'amitié, l'amour, la tendresse, la force brute, la ténacité, le respect des autres, l'empathie, etc … On ne peut évidemment pas suspecter Claude Pinoteau d'avoir manigancé ou prédit quelque chose (ce serait un comble !) mais personnellement, je trouve que ça tombe vraiment bien pour une si splendide carrière. Rien que pour ça, le film détient, involontairement, une plus-value qui dépasse l'intrigue.

Un autre grand intérêt du film, c'est la belle musique de Vladimir Cosma et en particulier son concerto pour violon interprété par Ivry Gitlis et l'orchestre philarmonique de Berlin. Là, encore, au risque de me répéter, ça tombe bien pour une belle sortie de Lino Ventura…

Du côté des seconds rôles, il y a Lea Massari qui était, aussi, là dans "le Silencieux". Ici son rôle est chargé d'émotion (c'est un peu sa marque de fabrique...) mais j'oserais avouer, sans trop savoir pourquoi, que j'ai toujours eu un peu de mal à adhérer à son jeu.

Elisabeth Bourgine tient ici le rôle d'une violoniste, fille adoptive du personnage de Lino Ventura. En revanche, tout aussi inexplicablement que mon appréciation sur Léa Massari, j'aime beaucoup la fraîcheur et l'espèce d'ingénuité de son jeu …

Un second rôle qui marque les esprits dans le film, c'est le clown triste et ventriloque que joue Jean Poiret, l'ami de Lino Ventura qu'il n'abandonnera jamais même si intérieurement, il l'agace un peu : Lino Ventura, quoi !

Et je terminerai par l'encore jeune Jean-Pierre Bacri dans le rôle de l'iconoclaste et jubilatoire inspecteur Esperanza : même si ça ne sert pas à grand-chose dans l'intrigue (voire pas du tout), c'est tout-à-fait réjouissant de trouver ce personnage qui s'incruste avec ses deux filles. On va encore me trouver lourd, mais on retrouve ici la capacité d'empathie de Lino Ventura (qui rappellerait presque celle qu'il développe dans "l'emmerdeur")

Sans oublier le commissaire de police joué par un Roger Planchon qui pousse "la chansonnette" au placide Lino Ventura, venu porter plainte et se retrouvant suspect …

Au final, c'est un film dont le scénario est quand même plutôt moyen auquel, si j'étais juste un peu raisonnable, je mettrais entre 5 et 7.

Mais comme je vois ce film essentiellement à travers Lino Ventura et comme je ne suis pas du tout raisonnable, je n'hésite pas une seule seconde.

Ce sera 8 à cause, entre autres, du dernier plan du film, absolument splendide, du visage de Lino Ventura, fixe, plein d'empathie, vaguement coupable, en train de contempler sa fille adoptive, Elisabeth Bourgine.


JeanG55
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Films noirs

Créée

le 13 déc. 2022

Critique lue 55 fois

7 j'aime

1 commentaire

JeanG55

Écrit par

Critique lue 55 fois

7
1

D'autres avis sur La 7ème cible

La 7ème cible
Docteur_Jivago
6

Arrivederci Lino

Sorti en 1984, La Septième Cible représente le dernier vrai rôle de Lino Ventura pour le cinéma Français, trente ans après ses débuts dans Touchez pas au grisbi. Mis en scène par Claude Pinoteau, on...

le 30 déc. 2016

17 j'aime

La 7ème cible
Val_Cancun
7

Le dernier rôle de Lino

"La 7ème cible", c'est pour moi l'archétype du film du dimanche soir de mon enfance (2 films sinon rien avec Carte Noire!), celui que je n'avais pas le droit de regarder "parce que demain y a...

le 1 juin 2015

12 j'aime

La 7ème cible
cinemusic
7

Le dernier Pinoteau/Ventura

Bastien Grimaldi (Lino Ventura) est un ancien journaliste devenu écrivain. Un soir il est victime d'une agression qui semble totalement gratuite. Mais le lendemain et les jours qui suivent il va être...

le 24 nov. 2022

8 j'aime

5

Du même critique

La Mort aux trousses
JeanG55
9

La mort aux trousses

"La Mort aux trousses", c'est le film mythique, aux nombreuses scènes cultissimes. C'est le film qu'on voit à 14 ou 15 ans au cinéma ou à la télé et dont on sort très impressionné : vingt ou quarante...

le 3 nov. 2021

23 j'aime

19

L'Aventure de Mme Muir
JeanG55
10

The Ghost and Mrs Muir

Au départ de cette aventure, il y a un roman écrit par la romancière R.A. Dick en 1945 "le Fantôme et Mrs Muir". Peu après, Mankiewicz s'empare du sujet pour en faire un film. Le film reste très...

le 23 avr. 2022

21 j'aime

8

125, rue Montmartre
JeanG55
8

Quel cirque !

1959 c'est l'année de "125 rue Montmartre" de Grangier mais aussi des "400 coups" du sieur Truffaut qui dégoisait tant et plus sur le cinéma à la Grangier dans les "Cahiers". En attendant, quelques...

le 13 nov. 2021

21 j'aime

5