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Ce film avait trois enjeux majeurs : plaire à un nouveau public qui découvrait pour la première fois cette histoire, plaire aux amoureux du dessin animé de 91 (qui est une référence outre-atlantique, étant le premier film d’animation nommé aux Oscars pour meilleur film), et enfin tenter de confirmer la stratégie de Disney à rebooter ses classiques après quelques départs timides mais renforcer par le récent Livre de la jungle. Pour ma part, le résultat final sera globalement bon, même très bon, malgré quelques petites fausses notes.


Autant commencer par le début : si les précédentes adaptations live des classiques Disney reprenaient la même histoire mais s’offraient de nombreuses libertés avec l’intrigue, cette version de La Belle et la Bête est une adaptation pure et simple du film d’origine (d’ailleurs, le générique précise bien que s’est adapté du film d’animation). La première partie notamment, mis à part 2-3 détails, en est même une version live tout simplement. Je ne vais donc pas raconter l’histoire, je pense que tout le monde la connait. La seconde partie prendra quelques libertés, même si on retrouvera une nouvelle fois d’énormes points communs, ce qui m’amène à mon ressenti global sur le film.


Cette version est très intéressante car on sent vraiment que les scénaristes sont allés chercher du côté des fan-vidéos et autres qui pointaient les faiblesses de l’intrigue du film d’animation, et se sont ensuite attachés à les corriger. Au revoir donc toutes les théories présentées jusqu’à présent :


le prince n’était pas un gamin de dix ans lorsqu’il a été transformé en monstre, le sortilège inclut également l’effacement de la mémoire des villageois et une sorte de zone tampon pour rendre difficile l’accès au château et accentuer son isolement, les habitants du château sont maintenus dans une sorte de stase…


Bref, toutes les théories sont ici expliquées et résolues plus ou moins. Le film aborde également plusieurs idées que j’ai trouvées très sympa.


Le fait que Belle soit au courant de la malédiction qui plane sur le château et montre son envie d’aider les habitants à la rompre (même si du coup, ceux-ci tentent de l’en dissuader afin que ce soit le fameux amour sincère). Le fait également que la malédiction a un véritable poids sur le château et ses habitants : les ailes qui tombent peu à peu en ruines, les servants qui se transforment peu à peu définitivement en objets (ce qui, d’une certaine façon, renforce le lien entre le Prince et ses serviteurs).


Autant d'idées vraiment intéressantes et qui, à l'image des précédents remakes live, renforcent l'univers.


On aura également une intrigue autour du Prince un peu plus développée, et surtout une relation avec Belle non pas approfondie mais prise sous un prisme différent afin de coller avec une version plus moderne, conduisant à l’un des plus grands changements :


le Prince sait lire ! Mieux, il aime lire ! Et encore mieux, il a des points communs avec Belle !


Et c’est sur ce partage que leur relation se construit et se renforce. Cette relation entre Belle et le Prince s’attarde d’ailleurs leur rapprochement,


l’intrigue nous permettant ainsi d’en apprendre plus sur leur passé respectif et où chacun découvre un peu mieux l’autre.


On retrouvera bien sûr plusieurs moments de complicité déjà vus dans le film d’animation. Jusqu’à cette fameuse scène du bal. Je reviendrai dessus un peu plus tard, mais j’ai trouvé cette scène intéressante. Dans le film d’animation, c’est le point d’orgue de l’intrigue, celle où tout bascule pour les deux personnages, où leur destin se scelle définitivement. Là, on sent comme une sorte de retenue, notamment du côté de Belle. Au départ, je me disais que y’avait un problème quelque part, qu’ils avaient échoué à retranscrire le truc, cet aspect complètement « whaou » du dessin-animé.


Mais en attendant un peu, il y a la scène juste après qui apporte la réponse par une réplique magnifique et fantastique de Belle : on sent qu’il manque encore un tout petite truc pour scelle définitivement l’ensemble. Qu’on y est presque, tout est en place, il manque plus que l’élément déclencheur. Et j’ai trouvé ça brillant, même si du coup le fameux élément déclencheur arrive plus tard et n’est pas forcément bien mis en valeur à mon sens.


Concernant les majeures différences avec le dessin-animé, il y a également les personnages. Alors je débute par quelque chose qui n’est pas tant une différence, mais j’ai personnellement moyennement accrochés aux serviteurs durant le film. Ils ont un rôle sensiblement semblable, mais je ne sais pas, il manquait un truc pour s’y attacher comme dans le dessin-animé. Pourtant, on a plusieurs scènes entre eux, et même des relations plus développées entre certains. Belle est dans la lignée de son personnage animée, en étant plus indépendante par certain côté, mais c’est surtout son côté créatrice que j’ai apprécié : non seulement elle aide son père, mais elle fabrique également ses propres outils ! Dommage que ça ne revienne pas plus souvent par la suite. La Bête/le Prince est un peu moins terrifiant, avec un humour plus prononcé, presque comique par moment.


Reste alors la principale modification par rapport au film d’animation, le trio de personnage Maurice-Gaston-LeFou. Le père de Belle aura un rôle assez proche, mais il paraîtra moins excentrique, et surtout son intrigue avec Gaston sera en partie réécrite. Je trouve cependant dommage qu’ils ne soient pas allés jusqu’au bout :


ici, Gaston décide d’accompagner Maurice lorsqu’il débarque dans la taverne ; mais il finit par l’abandonner au bout d’un moment (ce qui permet d’introduire un des éléments les plus prévisibles de cette nouvelle intrigue), et on finit par la suite par recouper avec le dessin-animé,


alors qu’il aurait été intéressant d’exploiter le truc jusqu’à bout et laisser de côté cet aspect-là de l’intrigue.


Du coup, pour ce qui est de Gaston et LeFou, on va jouer cartes sur table : LeFou vole la vedette dans pratiquement toutes ses scènes, peu importe quand ou avec qui. Ils ont transformé ce personnage faire-valoir idiot en comme quelque chose s’approchant d’une certaine conscience de Gaston, mais qui est en quelque sorte aveuglé par son amour (je pense qu’on est au-delà de l’admiration par moment) et se laisse donc « dominer ». Mais il nous réservera un nombre de répliques tellement géniales, il sera tellement énorme dans chacune de ses apparitions, qu’on attend le stade du personnage à spin-off potentiel. Gaston sera assez proche de celui du dessin-animé, mais il apparaîtra également non pas plus approfondi (encore que), mais plus subtile, et plus amusant aussi. Clairement, ce duo fonctionne bien mieux et est bien plus intéressant que dans le dessin-animé. Une véritable amélioration.


Globalement, l’intrigue de ce remake est d’ailleurs du même niveau, voire même un poil meilleur que celle du dessin-animé ; alors pourquoi j’ai un ressenti global inférieur ?


Le premier vient du casting. Si Luke Evans et Josh Gad sont plutôt bons dans leurs rôles de Gaston et LeFou, participant à vraiment améliorer ses personnages, j’ai trouvé le reste plutôt fade. Difficile de juger Dan Stevens et les autres serviteurs, vu qu’on ne les voit pas vraiment pendant le film, mais je pense qu’ils participent au fait que ce soit la raison pour laquelle je n’ai pas vraiment accroché aux personnages. Que ce soit Ewan McGregor avec son accent qui sort d’on ne sait où ou Stanley Tucci plutôt morne. Bon, reste bien sûr Ian McKellen toujours irréprochable, et Dan Stevens réussit quand même à faire passer quelques trucs par son personnage. Pas trop convaincu par les villageois (même si on leur donne un rôle un poil plus consistent).


Après voilà, reste la star du film : Emma Watson. Mais est-ce que ça vaut vraiment la peine de s’appesantir ? Depuis des années, les fan-arts pullulent sur le net, elle est liée au projet depuis des années et le film ne fait que confirmé qu’elle est née pour jouer cette version de Belle. Non seulement est grandiose et magnifique (quand elle apparaît dans la robe, on est juste whaou), incarnant une des meilleures princesses Disney, live ou animée, mais on découvre également qu’elle sait aussi chanter la bougre. Et plutôt bien ! Bon, on notera cependant qu’elle a quand même un peu de mal pour danser (ça cassait un peu le truc de la voir sautiller pour suivre le rythme).


Étrangement, c’est sur l’aspect technique qu’au final le film décevra le plus. Là où le dessin-animé était une référence du genre, le film échoue à recréer cette ambiance. Alors comme je l’ai dit, il s’agit par moment d’une version live du dessin-animé, notamment lors des chansons. Car je ne l’ai pas encore dit, mais plus que les autres remakes live récent, cette version de La Belle et la Bête est une véritable comédie musicale. On retrouvera donc toutes les chansons du film original, plus deux autres nouvelles (qui apportent pas mal à l’ensemble au final). Alan Menken reviendra d’ailleurs à la musique et aura l’occasion de jouer sur les thèmes qu’il avait créé à l’époque et d’en ajouter de nouveaux. Du coup, ce côté transposition live est particulièrement vivace dans ces passages chantés, notamment avec C’est la fête ! : ce qu’on faisait en 91 en dessin animé, on le fait désormais en CGI.


D’ailleurs, j’ai un avis plutôt partagé sur les effets spéciaux. Globalement, ils sont plutôt très bien faits et plutôt crédibles ; cependant, le fait de situer ça dans un univers « réel » et en CGI, ben du coup on enlève la possibilité de pouvoir de créer des personnages visuellement cartoonesque. Et c’est un des autres problèmes avec les serviteurs du château : les CGI sont bluffantes, aucun doute là-dessus, c’est juste que j’ai moyennement adhéré au design. Idem pour la Bête qui, du coup, est moins impressionnante et effrayantes et se rapprochera un peu de ce qu’on avait vu dans le film de Gans il y a 3 ans. Les costumes aussi sont vraiment pas mal du tout, reprenant plutôt bien l’aspect du dessin-animé tout en les rendant cohérents avec un univers visuel réel.


Le seul gros point positif de ce côté-là du film, ce sont les décors. Comme je l’ai déjà dit, j’aime beaucoup la façon dont ils sont intégrés dans la malédiction. Après, on voit toute la puissance des moyens de Disney dans la construction du village et du château lui-même pour créer une ambiance visuelle très proche du film d’animation. Reste alors la mise en scène, et je dois avouer que Bill Condon ne m’a pas vraiment convaincu dessus. Dans l’ensemble, c’est bien filmé, mais il manque vraiment ce petit truc qui pourrait transcender l’histoire, et reprendre certains plans du dessin animé (d’où le côté transposition live) ne suffit pas. Il ne faut pas recréer, il faut créer cette transcendance. Et c’est ce qui est parfaitement illustré dans la scène du bal, où on perd énormément de ce qui faisait la force de cette scène. Alors oui, j’ai expliqué que l’intrigue venait au secours, mais au niveau de la mise en scène, on ne ressent pratiquement rien, pas de chair de poule, rien. Après, certaines scènes sont au contraire plutôt bien menées (comme je l’ai dit plus haut, quand Emma apparaît dans sa robe, on sent vraiment le côté « la princesse est dans la place »), mais elles sont bien trop timides.


Le Belle et la Bête cru 2017 s’avère donc être un bon film. À part quelques défauts ici et là, l’intrigue pourrait même s’avérer meilleure que l’originale ; mais c’est bien au niveau du casting et de l’aspect technique que le film échouera a vraiment non pas recréer mais créer sa propre dynamique pour être transcender et être parmi les plus grands Disney. On retiendra donc principalement qu’Emma Watson était bien née pour ce rôle, et LeFou qui vole la vedette sur pratiquement toutes ses scènes. Dernier point : ceux qui seront tenté par la VO, préparez-vous mentalement parce qu’il y a également un aspect très caricatural à ce niveau, illustré par une de ces répliques fantastiques, je ne vous raconte pas mon fou rire. Bref, une adaptation qui mérite le détour et ravira probablement les fans.

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le 20 mars 2017

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vive_le_ciné

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