La Bête
6.4
La Bête

Film de Bertrand Bonello (2023)

Bon je commence par quoi là?

Cette question, c'est à la fois celle que je me pose avant d'écrire la critique, mais aussi celle que le réalisateur aurait du se poser au lieu de nous infliger une première partie extrêmement chiante.


En effet, La bête a de quoi dérouter en proposant des aller-retours à travers les époques au milieu d'une profonde banalité. Les dialogues sonnent creux, sont plutôt indigents, et participent à une ambiance de film français que n'auraient pas renié une parodie des inconnus en leur temps. On se demande si le film décollera, si l'histoire va enfin faire l'effort de nous amener à du concret et nous faire rentrer dedans, au lieu de nous montrer ces scènes affligeantes. On se demande ça une bonne demi-heure, et après, c'est le choc.


Le film nous entraîne dans un labyrinthe de scènes frappantes, iconiques, rythmées par une musique hypnotisante proche des films de Winding Refn. On prend un malin plaisir à repérer les indices laisses ici et là, bon nombre de symboliques trouvent leurs significations dans d'autres scènes et ainsi de suite. Un véritable puzzle qui se rapproche d'une prise de tête style Christopher Nolan, mais avec un certain charme français indéniable.


A plusieurs reprises, La bête se permet des moments oppressants, dérangeants, voir terrifiants de réalisme. Parfois aussi, quelques scènes iconiques en boîte de nuit apportent une nouvelle énergie au pouvoir hypnotisant du film. En tant que grand amateur, je suis bien obligé d'être touché à un point sensible.

je suis absolument amoureux de la séquence avec Fade to Grey, bluffé par les maquillages et l'ambiance

Quelques fois, la folie artistique de la réalisation se perd un peu dans ses effets, comme si aucun producteur n'avait été là pour proposer un minimum d'encadrement. Cette liberté artistique doit cependant être reconnue. La bête est un film qui ose des trucs un peu originaux, flirtant avec beaucoup de genres différents qui, ensemble, forment un ovni que l'on apprécie vraiment qu'à tête reposée, après le (pseudo) générique


Alors, comme juger La bête? bah je sais toujours pas. La première demi-heure est franchement dispensable, non pas pour son scenario qui s'intègre bien sur la durée, mais pour son aspect désincarné et trop lancinant. Mais la capacité du film à surprendre, à accrocher le spectateur sur son siège tant il sait jouer avec nos nerfs, ne peut pas être ignorée par une note trop sévère.


L'interprétation de Léa Seydoux est une vraie plus-value, notamment dans les moments précédents les épisodes les plus dramatiques du film. Quant à George Mackay, il interprète tantôt un personnage fascinant, tantôt terrifiant, avec une aisance remarquable.


Sorte d'enfant un peu bâtard issu de Last night in Soho et d'Under the Silver Lake (je ne cite pas pas ces films pour rien, les changements d'ambiance notamment sont très similaires), La bête semble être tout autant le fruit d'un Christopher Nolan en roue libre qu'un Nicolas Winding Refn le néon en moins. Peut-être un deuxième visionnage permettrait-il un avis plus tranché, mais quand le film dure deux heures et demi, devoir passer par son ventre mou dès la deuxième minute peut être un peu compliqué.

A defaut, je me contenterai donc d'acclamer encore quelques excellentes scènes ici et là qui montrent que le cinéma français est capable aussi du meilleur.

lordwraith

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