Shotgun Blues

Tonton Claude et moi quittons Saint-Malo à bord de la 2cv de son amie Jeanne.

- "Alors, elles sont pas sympas mes copines ?"
- "Sympas ? Euh...moui, si tu veux. Apparemment faut pas leur chier dans la main !"
- "Leur chier...dans la main ?!"
- "Ouais faut pas les pousser à bout. Dis-moi, elles s'raient pas un peu goudou, elles m'ont l'air plutôt très proches dans le genre promiscuité, si tu vois j'veux dire !"
- "J'en sais rien, j'veux pas les juger et j'm'en fous si elles se glougloutent !"
- "J'en mettrai pourtant ma main à couper !"

J'ai pas vu grand-chose de Saint-Malo, on est resté cloîtré quasiment tout le long du séjour, en périphérie de la ville, dans une immense baraque isolée et occupée par un riche couple de bourgeois et leurs deux mômes. Ils sont si blindés qu'ils ont Sophie pour "boniche", comme ils disent. Ils m'ont paru pas mal méprisant envers elle et ils l'exploitent impunément.
Mélinda, la doyenne de leurs deux enfants, est plutôt aimable et attentionnée envers Sophie qui du haut de sa vingtaine se veut une rebelle gauchiste de papier bien trop à l'aise dans son luxueux cocon. Tout le contraire de son ado de frère qui est déjà conditionné aux principes de sa caste.

J'lui ai trouvé un bon air attendrissant à cette Sophie très secrète, renfermée, un peu neuneu (faut la voir scotchée à la télé à mater les programmes les plus débiles). Elle est pas bien jolie avec sa frange coupée au taille-haie, plutôt vieille fille mais qu'est-ce qu'elle est serviable ! Une véritable bonne à tout faire, un robot multi-tâches ! La Rémi Bricka du ménage !
J'ai ouï dire qu'elle trainait un passé trouble, son père handicapé est parti en fumée dans des circonstances restées inexpliquées.
Mais surtout Sophie souffre au quotidien d'un terrible handicap : l'analphabétisme.

J'ai également rencontré sa copine Jeanne, une postière timbrée pas bien maligne non plus, 12 ans d'âge mental, irrespectueuse, teigneuse et exubérante.
Un temps elle fut soupçonnée d'infanticide mais "z'ont rien pu prouver" pour la paraphraser.
M'est d'avis qu'elle est l'uppercut, le maillon dominateur d'une Sophie malléable et apte à la pousser à commettre des conneries...

Cette étape à Saint-Malo était intéressante bien que l'ambiance ait couillé sur la fin mais je commençais à trouver le temps long et tous ces gens lugubres.
- "Bon, Tonton. On avale du bitume depuis un bail, tu veux bien me dire vers où tu me trimballes présentement ?"
- "Le Périgord, mon grand ! De bonnes tables, de bonnes bouteilles et mon pote Popaul le boucher à te présenter"...

Mon humble cycle consacré à Chabrol est par ici : http://www.senscritique.com/liste/Tonton_Claude/395073