Certes, la façade morale du film et l’incitation à la prudence des jeunes filles en face de la drague des garçons est un message qu’on s’attendait à entendre. Mais forcé l’on est de reconnaître que le film transpose adroitement certains contes dans son récit, et qu’il parvient à en faire une synthèse cohérente. L’exemple le plus frappant et celui du petit chaperon rouge, la grand-mère faisant office de sagesse, et le loup étant ici remplacé par un gentilhomme prétendant s’être perdu en forêt. On assistera alors à une sympathique adaptation des dialogues connus du conte, un véritable régal pour amateur de psychologie. Car ces longs rêves seront, pour le coup, facilement lisibles et toujours vus sous un angle métaphorique. C’est le grand point fort de ce récit, les deux principaux niveaux de lectures sont immédiatement perceptibles et chacun d’eux pourra être apprécié (simultanément) par le spectateur, qui pourra alors juger de la qualité de l’écriture. Au niveau de l’interprétation, si les jeunes acteurs sont parfois un peu théâtraux, le tout passe plutôt bien, les différents personnages illustrant leur rôle avec suffisamment de conviction. Toutefois, notons bien qu’il y a un réel aspect horrorifique dans ce film. La première scène avec les loups cherche à ce titre à terrifier, montrant une jeune fille sans défense aux prises avec une meute de loups. Ce ne sera qu’après que la lycanthropie viendra se mêler au récit, l’enrichissant de ce sous-texte sexuel assez adroitement restitué. On notera aussi quelques effets spéciaux largement à la hauteur de nos attentes (bien que rares) au niveau des transformations lycanthropes, que ce soit lors de la séquence du buffet de noblesse (image guère surprenante qu’une noblesse carnassière, mais sympathique) ou de l’impressionnante transformation dans la chaumière, où un loup garou s’arrache la peau du visage avant de se transformer (l’effet est pour ainsi dire terrassant, on se demande si ce n’est pas un film d’horreur qu’on est en train de voir). Avec de beaux effets spéciaux et des décors très kitch (on essaye de nous faire croire à un village avec une maquette digne d’une crèche paroissiale avec des ampoules dans les maisons en agile), La Compagnie des loups reste un petit plaisir fantastique de bon aloi, capable en tout cas de créer un petit univers de conte atypique, plus adulte, sans pour autant gâcher le climat ingénu qui règne dans ce genre d’œuvre. Un essai intéressant qui utilise intelligemment les codes du loup garou, et qui devrait ravir les amateurs de bisserie à l’ancienne.

Voracinéphile
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le 15 déc. 2015

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