On ne badine pas avec l’amour ? Las ! Alain, la quarantaine fringante, ne semble pas avoir compris la célèbre maxime de De Musset, persistant à virevolter parmi ses amant(e)s avec une conviction aveugle teintée de résignation plus ou moins acceptée. La première scène du film, irrésistible et follement impertinente, donne directement le ton, représentative de ce que sera le film, à savoir les perpétuelles tergiversations d'un homme incapable de se responsabiliser. Au cours de cette scène, Alain s’entretient sans détour avec ses différent(e)s partenaires qui se succèdent dans son lit. Extrait :

- Entre nous, c’est que du cul ? s’interroge Alain.
- J’aime que ça, j’y peux rien, mais toi aussi de toute façon, lui sermonne un de ses amants.
- Tu voulais pas un yaourt ? demande-t-il soudain à la fille alanguie à ses côtés.
- Je veux bouffer ta bite ! lui répond-elle avec aplomb.
- Je croyais qu’elle avait un drôle de goût ? minaude-t-il en faisant la moue.
- Non, c’est quelque chose en toi qui me dégoûte, lui répond alors un autre amant.
- On baise quand même ? finit par lâcher Alain.
- Oh je sais pas, c’est trop rapide, mais si tu veux j’te suce, soupire une nouvelle conquête féminine.

Certes, Alain aimerait bien épouser Laurence qui est enceinte de lui, mais il a une relation avec Christophe, le petit frère de Marlène (une ex), en plus de furieusement convoiter Marc (un détenu dont il l’est l’avocat) et aussi sa petite amie, Babette, qui elle en pince carrément pour lui. Le cœur du problème est là, niché dans cette ambivalence des émotions et des sexes : exiger d’Alain qu’il prenne une décision raisonnée et raisonnable dans tout ce charivari passionnel reviendrait à lui demander "d’arrêter de se chier dessus constamment" (dixit Laurence). Alain ne sait plus où donner de la tête et de la queue, voilà, et puis tout le monde le harcèle, le presse, ça l’éreinte, ça le perturbe davantage dans les choix cruciaux qu’il a à faire et ceux qu’on lui demande (qu'on lui ordonne) de prendre.

Mais cette impression d’atermoiement existentiel est générale, et il y a finalement des immatures derrière chaque porte ouverte et dans chaque lit défait, des grands enfants qui singent les adultes (ou inversement) tout en cherchant la paix des esprits, agaçants mais attendrissants, enquiquineurs mais sympathiques. Entre eux, ça butine, ça gamberge, ça s’envoie en l’air et ça cherche un sens relatif à une vie qui paraît trop compliquée. Cru sans jamais être vulgaire, osé sans être trivial, le film d’Ilan Duran Cohen bénéficie d’une interprétation hors pair et, principalement, d’un scénario enlevé, imprévisible et très drôle (la plupart des répliques sont hilarantes). La confusion n’est pas seulement dans les genres, elle s’invite aussi dans les sentiments et les élans du cœur. Tout le monde désire Alain mais, surtout, Alain désire tout le monde.
mymp
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le 27 nov. 2012

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