Voilà un film qui me laisse pour le moins circonspect et m’a fait penser de bout en bout à une chanson de George Brassens, « Histoire de faussaire ». Tout y résonne un peu toc, émotions, récit, images, mise en scène… S’attaquer à un biopic n’est jamais chose facile, tâche plus ardue encore quand il s’agit d’un premier film. Certes.


La temporalité reste le problème majeur, la vie de Loïe Fuller est effeuillée au petit bonheur la chance et l’on a l’impression, à l’image de sa coupe de cheveux, que rien ne change et que le temps ne passe guère. Des Etats-Unis à la France le parcours a pourtant été pour le moins long. Je passe sur les impasses de sa vie (ses premiers succès à Brooklyn, son mariage…) et ne retient que ce qui devait être le cœur du sujet, l’arrivée quasi meurtrière (artistiquement parlant) d’Isadora Duncan (incarnée par une bien terne Lily Rose Depp). Cela est traité à l’emporte pièce, sans réelle passion, plus abordé que vraiment travaillé. C’est d’ailleurs une constante dans le film, puisque Stéphanie Di Giusto œuvre sur bien des pistes, le rapport à la danse (ou la non danse !), les motivations de l’artiste, sa relation au monde, l’homosexualité… mais elle ne fait que les survoler. Le tout formant une espèce de patchwork pas forcément désagréable à suivre, mais un peu creux, un peu faux.


Le pire est lorsque l’on aborde la fameuse danse serpentine, et la retranscription à l’écran d’un des fameux tableaux présenté au public des Folies Bergères. Là où il aurait fallu obtenir une vraie reconstitution de cette prouesse scénique, on assiste à une prestation en tout point magnifique, mais sublimée par des effets spéciaux plombant l’aspect avéré d’alors et la sensation qu’il provoquait. Une sorte de mapping sur humain qui titille l’œil un instant, mais n’appelle aucune émotion. Et là, l’authentique tique.


« La seule chose un peu sincère, dans cette histoire de faussaire et contre laquelle il ne faut peut-être pas s'inscrire en faux », c'est mon penchant pour les détails. Et voir dans la scène où Isadora plante Loïe, lui remettant une écharpe (objet vestimentaire qui n’a pas vraiment réussi à la Duncan) en guise de présent d’adieu m’a fait sourire. C’est cette férocité qu’il aurait fallu instaurer dans tout le film, il aurait gagné en intérêt.


Heureusement, Soko porte son rôle à merveille et Ulliel (pourtant dans un personnage 100% faux !) lui apporte un beau pendant par sa présence, son charisme et la précision de son jeu.


La vraie Loïe Fuller https://www.youtube.com/watch?v=fIrnFrDXjlk

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le 4 oct. 2016

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Fritz Langueur

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