Quand je vois un "Truffaut", je suis époustouflé par la limpidité de manoeuvre... Ou comment conter des histoires compliquées en enchaînements, en dialogues simples et significatives.

Il répond synchrone à ma demande de clarté et, de ce point de vue, je suis convaincu de ne pas être seul.

Ainsi, la femme d'à-côté est le moment de multiplier et de diversifier les clins d'oeil sur un passé passionnel douloureux. Mais la suite des évènements n'est pas mécanique et c'est ce qui fait le charme de ce fait divers de chiens écrasés, conté en incise par un ex-passionnée qui s'en est sortie - Madame Jouve.
Cette Madme Jouve est l'oeil omniscient. En regard de son passé, elle connaît tous les interstices de la passion. C'est d'ailleurs elle encore qui parle de "dépassionner tout cela". Comme une écharde qu'on ôte à force d'avoir trop serrée une rose dans son poing. La passion est une focalisation sur une chose unique tandis qu'au fur et à mesure tout ce qui n'est pas cette chose devient fade, voire prison. Mais à force d'aller à la rencontre cette chose, dans la bascule du désir et de sa nature d'être irrassasiable, la passion devient source de frustrations.

Dans "La Femme d'à côté", il y a un élément qui a décroché de tout le reste de la passion : Bernard s'emporte sans raison contre Mathilde, la tenant responsable de tous ses tourments. Et comme cet évènement est un tournant majeur, une somme d'éléments farfelus m'est parvenue : si l'on désirait approfondir le trait du fait-divers, n'aurait-il pas fallu comprendre le mécanisme au travers d'éléments extérieurs ? A cet instant, le film perd en clarté pour emmener vers des chemins plus faciles : pourquoi le dessin ? Pourquoi le tennis ? Pourquoi les bateaux ? Quel est le rôle des "cocus" pour quels enjeux ? - ce qui laisse à penser à un remplissage... ou à quelque chose de simple qui n'a que le désir de rester en surface.

Mes détracteurs diront que tout est logique et dense dans ce déroulement. Ils me diront qu'ils ont adopté l'ensemble de cette passion sans sourciller. Ou encore qu'ils ont trouvé naturel, rien qui ne clochait, à cet emportement sans raccord et si soudain sans voir qu'ils ont sauté une étape essentielle, celle d'un marchandage qui pousserait Bernard dans ses derniers retranchements et le laisserait sans autre ressource que cette explosion. Truffaut comme Chabrol savent très bien faire s'immiscer des éléments de contraintes sur les êtres. C'est pourquoi je ne laisse pas échapper ce que je considère être une erreur monumentale.

Peut-être est-ce moi, le passionné pour me focaliser sur une logique où il n'y a rien à comprendre. Mais à ce moment-là... Tout le reste devient trop logique !

Dans cet amour de la souffrance, j'ai perdu le fil de cet Ariane... et il m'est avis que ce n'est pas anodin.
Andy-Capet
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le 18 mars 2013

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le 18 mars 2013

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Andy Capet

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