Si Mary Shelley faisait entrer son roman dans la modernité avec le genre gothique, Whale lui rend hommage une fois de plus en ralliant son film du côté littéraire au moyen d'un cinéma expressionniste.
Il est étonnant de se trouver face à une oeuvre où humour noir, terreur, pessimisme et humanisme cohabitent.

Le film commence dans le salon bourgeois des Shelley où la jeune Mary se délecte de raconter sa nouvelle histoire débutant sur un coup de théâtre et nous plongeant directement dans l'action : la créature de Frankenstein est toujours en vie.Ambiance fin XIX ème parfaitement retranscrite par Whale où de jeunes intellos malicieux adorent se faire peur.

Notre monstre ainsi ressucité acquiert une dimension encore plus humaine dont l'incompréhension de nos semblables envers lui n'en sera que plus cruelle.Parfois nous sommes face à un enfant qui articule quelques mots,qui fume tant bien que mal sa première clope et qui pleure quelques larmes.Boris Karloff est magistral, ce fut dit et redit mais je ne peux m'empêcher d'admirer cette prestation mêlant colère,force physique et innocence.
Car tout est ambigu dans Frankenstein, à commencer par le titre:combien confondent encore la créature et le docteur?Evidemment c'est voulu par l'auteure,mais ici pour qui est la fiancée alors?N'est ce pas une brillante idée que d'avoir fait jouer la créature féminine et Mary Shelley par la même actrice?(Elsa Lanchester)

Le sujet de la science sans conscience est moins présent que dans le premier volet magré un Dr Pretorius bien taré à la limite de la bouffonnerie, ici ce sont les relations humaines qui priment filmées dans une mise en scène de toute beauté.Jeu théâtral des années 30, nous voyons de suite que Whale prend le partit des individus différents, comme le personnage de l'aveugle en marge de la civilisation et déjà présent dans le roman original.

Une histoire éternelle, dans un temps où se poser des questions n'était pas une prise de tête mais une catharsis, le prométhée moderne s'achève ici sur l'archétype de deux couples et Shelley à jamais unie à son chef d'oeuvre.

Ligeia
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le 9 nov. 2011

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