La Fosse aux serpents fait partie de ces films des années 40-50 qui ont donné une place importante à la psychanalyse. Freud était mort en 1939, et Hollywood s’est vite emparé du sujet — souvent avec un manque de finesse qui, chaque fois, me laisse au bord du chemin.
Ce film en dit plus sur son époque et ses limites que sur la complexité de la psyché humaine. The Dark Mirror, tourné 2 ans plus tôt, également avec Olivia de Havilland est de la même veine.
Olivia de Havilland incarne très justement son personnage : elle rend perceptible l’angoisse, les pertes de repères, le désarroi intérieur. Mais le scénario, comme les personnages, manque de consistance.
La psychologie y est abordée de manière simpliste. Le trouble de l’héroïne est ramené à une cause unique qu’il faut "trouver" pour qu’elle guérisse. Aucun mot sur le contexte social, les pressions patriarcales, les violences ordinaires.
Comme souvent à cette époque, c’est une femme qui est pathologisée, tandis que les figures masculines endossent des rôles de sauveurs, en surplomb. Le personnage joué par Olivia de Havilland n’a pas réellement droit à la parole : elle est l’objet sur lequel le médecin projette son savoir.
La "guérison" correspond au retour à la norme, avec en ligne d’horizon la vie conjugale auprès d’un mari bienveillant.
Je reste décidément réfractaire à cette vague de films psychologisants. Il faut pourtant reconnaître que La Fosse aux serpents a été reçu comme novateur à l’époque. Il a voulu dénoncer l’univers asilaire. Mais il ne donne aucun vrai espace à la voix intérieure de la femme en crise. Il faudra attendre les années 70 pour qu’un autre regard commence à émerger.