Y avait-il vraiment besoin de remonter les deux parties de La Légende de Baahubali en un seul film de près de 4 heures pour les 10 ans du premier volet ? Y avait-il vraiment besoin de proposer quelque chose de neuf pour que les fans du film repaient leur place ? Une version "seulement" restaurée des films aurait-elle suffi ? Dans le cas des fans non-indiens, on peut penser que ça aurait suffi : beaucoup ont probablement découvert les films ailleurs que sur grand écran, juste après s'être pris une claque avec RRR (en salles... ou pas), et ont aussi probablement regretté de ne pas avoir pu les découvrir au cinéma.


Dans le cas des fans indiens: Dilwale Dulhania Le Jayenge (le film qui a fait le mythe SRK, le film cité par deux POTUS lors de leurs passages en Inde) est exploité depuis 35 ans de façon ininterrompue dans la même salle de Bombay donc... On peut aussi rappeler que cet été une reprise des Dents de la Mer a fini numéro 2 du Box Office US du week-end pour sa ressortie cette année. Justement, les Baahubali représentent à l'échelle indienne un succès et un phénomène popculturel de cette ampleur, une date dans l'industrie cinématographique indienne comparable au Spielberg pour celle des Etats-Unis.


On peut aussi tiquer devant l'expression Director's Cut. Elle se réfère souvent au cas de films pour lesquels les intentions du réalisateur ont été massacrées par un grand studio ou à un remontage de films mal reçus/incompris à leur sortie. Rien de cela dans les Baahubali : un cinéaste qui a eu les pleins pouvoirs artistiques, un succès à la Cameron à l'échelle de l'Inde, un accueil critique enthousiaste.


Les deux films sont certes très imparfaits et c'est normal : ils représentaient le galop d'essai du cinéaste dans une superproduction et il aura plus de métier de metteur en scène sur RRR. Certains plans sont moches et la mise en scène de l'action est loin d'éviter le tape à l'oeil, si l'on compare par exemple la bataille de la fin de la 1ère partie avec son inspiration évidente (Red Cliff de John Woo).


Mais tout cela est plus que compensé par leur souffle épique et leur envie de proposer du grand spectacle rappelant le gigantisme des superproductions hollywoodiennes de la fin des années 1950 produites en réaction à l'émergence du petit écran comme concurrent du cinéma. Du cinéma follement mythologique mélangeant Heroic Fantasy, Comédie musicale, complots shakespeariens et Péplum. Zéro seconde d'ennui et du coup il n'y avait aucun envie de voir tout cela raccourci.


Dans les suppressions de cette version remontée en un seul film, on compte quelques chansons et surtout la romance entre Sivu et Avanthika, réduite à une vignette. Un choix supposé accélérer le rythme mais qui sabote en partie la symétrie entre cette romance et celle entre Amarendra Baahubali et Devasena. Il y a eu aussi des coupes à l'intérieur des scènes de bataille.


Ceci dit, ce remontage est loin du massacre, ne détruisant pas le plaisir du revisionnage sur grand écran. Que cela représente (en dehors de la présentation des deux films d'origine aux Hallucinations Collectives) la seule opportunité hexagonale de voir les exploits de Prabhas sur grand écran pour les cinéphiles qui ont pris le wagon Rajamouli en 2022 donne envie de faire preuve de clémence. Les cinéphiles qui aiment cette version réduite pourront de toute façon regarder chez eux les deux parties. Et vivement la possibilité de se gondoler devant Eega en salles !

JohnTChance
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Top S. S. Rajamouli et Les films les plus attendus de 2025

Créée

il y a 7 jours

Critique lue 103 fois

5 j'aime

JohnTChance

Écrit par

Critique lue 103 fois

5

D'autres avis sur La Légende de Baahubali : L’Épopée - Director’s Cut

Du même critique

Barbarism Begins at Home
JohnTChance
10

Le Freak, c'est Chic.

Juste avant que les Smiths se séparent, Morrissey chantait la mort d'un danseur de disco. Ce qui ne l'avait pourtant pas empêché d'inclure dans le second album studio de son Velvet à lui cette longue...

le 3 déc. 2019

5 j'aime