La Loi
6.3
La Loi

Film de Jules Dassin (1959)

Au début, c'est vrai que j'ai eu du mal à entrer dedans. Malgré une mise en scène impeccable, le scénario rebute à cause d'une introduction lente, présentant tout le petit monde de ce village italien, sans le moindre conflit à l'horizon (à part un zeste de misérabilisme en cette période de crise économique).


Et puis, les thèmes se révèlent d'eux-mêmes, au travers des personnages ; les enjeux sortent de leurs tiroirs à chaussettes. Ça y est, on peut vraiment commencer. Dès lors, les conflits sont plus nombreux, mais ce qui marque le plus, c'est le rapport de force entre tous les personnages. Ce joli petit village ressemble soudainement à un laboratoire où l'on observe les rats comme l'a fait Desor : les forts se servent des faibles pour rester à flots, changez les groupes de rats et vous aurez automatiquement une nouvelle hiérarchisation. Le thème fort du film, c'est le pouvoir, le contrôle. Tous les personnages le subissent ou l'appliquent à un moment ou un autre. C'est très fort. Puis les dialogues sont très bons, tantôt piquants, tantôt tendres. Enfin quelques situations mémorables et très bien exploitées.


En fait, c'est le genre de film où il n'y a pas une histoire mais plutôt des histoires, des petites histoires même, qui se croisent. Le genre de film dont l'idée me séduit (un concept intéressant) mais dont le traitement, en règle générale, me déçoit car on cherche en vain un liant à tout ce fouillis. Ici, c'est assez évident. Seul le héros semble un peu à part. Peut-être pour servir de référant au milieu de cet univers où tout le monde cherche à contrôler ou à être contrôlé. Il subit tout de même le jeu de la loi à un moment, scène impressionnante d'ailleurs, mais ça s'arrête là. Et puis on peu reprocher au film sa fin un peu trop gentille là où on aurait souhaité un jugement plus sévère.


La mise en scène est efficace. En même temps c'est Dassin... un français qui se permet de rêver en américain. Et ses références, il ne se contente pas de les imiter,non ,il les comprend, il les ingurgite, il les digère à sa façon. On a droit à quelques audaces (ce simple plan sur des ombres pour marquer l'arrivée de gêneurs, idée géniale qui évite d'avoir recours à un mouvement de caméra). Les acteurs sont bons. C'est vrai qu'au début, le côté un peu théâtral peut rebuter, surtout par rapport au fait qu'il ne se passe pas grand chose. Et puis, au moment où le déclic narratif arrive, la forme prend son sens, renforce le discours. Après tout, nous sommes face à un petit théâtre, les personnages sont prisonniers de cette ville de vices, jamais nous n'en sortiront. Et une telle direction d'acteur ne fait que renforcer la bouffonade qui se cache derrière cette apparente tranquillité.


La musique est assez chouette. Il n'y en a pas beaucoup, sachez-le. Beaucoup de personnages qui chantent, souvent des chansons où ça crie et où ça rit. Mais de temps en temps quelques morceaux plus calmes aussi, qui ont un petit effet hypnotique. Quelques musiques bien composées aussi, en ce qui concerne celles externes à cet univers (j'oublie toujours le nom de ces deux types de musique dans un film : celui interne à l'univers - donc par exemple quand des personnages chantent, ou écoutent la radio - et celui externe à l'univers - par exemple le thème de James Bond quand il assure avec une nana, ou encore une musique classique venue de nulle part se fait entendre en plein climax).


Enfin, il y a Lollobrigida. On passe tellement de temps à reluquer sa poitrine que j'en finis par me demander si le terme 'lolo' pour désigner une poitrine ne viendrait pas de son nom. Les autres femmes de ce film sont belles, mais aucune n'égale cette charmante plante capable, en plus, d'envoûter avec sa voix, ses yeux, son charme.


Bref, "La loi" est un très bon film. Un peu lent au début, le projet prend très vite de l'ampleur, le tout soutenu par une mise en scène irréprochable. Chouette, j'ai passé un bon moment !


PS : http://image.noelshack.com/fichiers/2015/30/1437489514-la-loi.jpg

Fatpooper
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le 5 oct. 2014

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